12.10.24evenement L'évènement se termine officiellement avec son épilogue, qui révèle de nombreux éléments de la trame. De nouveaux enjeux arriveront dans les semaines à venir pour chaque faction !
21.07.24evenement Le deuxième Évènement du forum, « Les voix du passé » est lancé ! L'ensemble des RPs sont disponibles dans la catégorie qui lui est dédiée !
Cent huit ans avant notre ère, le chakra courut sur le monde comme une traînée de poudre. Venu de nulle part et de partout à la fois, il étreignit les hommes et anima leurs corps comme ceux des nouveau-nés dès leur premier souffle. Tel un raz-de-marée changeant le monde, son énergie leur offrit les prémices de ce qu’ils nommeraient « pouvoir », bien des années plus tard.
Celui de dépasser les limites que la nature leur avait jusque-là imposées. De donner vie et corps à leurs ambitions les plus folles comme à leurs vices les plus abjects.
Leurs chairs avaient été bénies de la grâce de l’alizée et de la force des typhons : leurs coups étaient plus précis, leurs organismes plus vigoureux. Un simple bond les menait jusqu’aux cimes des arbres majestueux du désormais Pays du Bois. Leurs pas les guidaient sans peine à travers les monts qui édifièrent bien plus tard les frontières de l’actuel Pays des Montagnes.
Alors, ils embrassèrent cette nouveauté comme chaque bien de l’Humanité : avec le profond désir de la dompter jusqu’au moindre détail, de faire cette énergie sienne avant tant d’autres. Il leur fallut des décennies pour maîtriser ce que le plus simple shinobi peut accomplir aujourd’hui – mais ils y parvinrent, en demeurant dans la profonde ignorance de l’origine du chakra.
Et ils comprirent. À quel point il pouvait receler la puissance de faire de l’imagination une réalité ; à quel point ils pouvaient dompter les leurs par la force et fonder les dynasties qui gouvernèrent le monde des années durant.
Régie par la noblesse, la richesse et par un grand sens de l'honneur et de la droiture, Homura se distingue ni plus ni moins des autres villages par son caractère guerrier à la limite du comportement militaire. Les shinobis qui sont formés pour devenir des shinobis d'Homura sont, dès leur plus jeune âge ou dès l'entrée dans la formation, forcés de respecter ce code d'honneur. Il est précisé que quiconque y dérogerait se verrait sanctionné de différentes façons... des travaux d'intérêt publique à l'emprisonnement et du bannissement des terres d'Homura à la pure et simple mise à mort.
❈ Tout shinobi doit être capable de se sacrifier pour la cause Homura-jin.
❈ Tout shinobi doit être capable de donner sa vie pour ses camarades, particulièrement s'ils sont plus jeunes ou s'ils sont moins expérimentés. De la même manière, il doit un incontestable respect à ces derniers.
❈ Tout shinobi doit être capable de se sacrifier pour les civils.
❈ Tout shinobi doit être capable de réussir une mission primordiale même si cela signifie abandonner ou laisser mourir ses camarades.
❈ Tout shinobi doit être capable de dissimuler ses sentiments personnels ; pire que cela, il se doit de les ignorer et de les faire passer au second plan.
❈ Tout shinobi doit une indiscutable fidélité à sa faction. Toute information dissimulée, cachée volontairement ou toute trahison quelconque sera sévèrement sanctionnée.
❈ Tout shinobi doit se dévouer à son entraînement et au perfectionnement de son corps et de son esprit. Il doit respect aux siens et aux autres, tolérance aux différences, empathie aux plus faibles et rigueur dans ses efforts personnels (qui doivent être constants et variés).
❈ Tout shinobi doit un indiscutable respect à ses supérieurs hiérarchiques et doit obéir au doigt et à l'oeil à leurs ordres. Toute insubordination sera sévèrement sanctionnée.
FUJIWARA SENCHI Portant sur ses épaules l'ensemble du clan Fujiwara, Senchi est un guerrier hors pair dont le jeune âge, la force d'esprit, la droiture, la témérité et les compétences l'ont rendu capable de se hisser au sommet. Un lien particulier mais inconnu le lie à Iwao, la Shogun, sans que personne ne sache trop quoi en penser. Certains le suspecteraient même d'être à l'origine de la mort de son père, bien que rien ne l'incrimine.
HYÛGA EIMEI Figure représentante du clan Hyûga, devenu chef en l'an 68, Eimei incarne toute la fierté des siens. Droit, noble, charismatique tout en restant sobre, il semble en savoir plus qu'il ne le devrait. Il est à l'origine de l'ensemble des mouvements du clan Hyûga, car rares sont les membres de son clan osant défier ses ordres ou agir sans son aval. Il fait parti de la branche principale.
NARA KUENAI Etant à la tête du clan Nara, Kuenai est extrêmement perspicace et dispose d'une intuition impressionnante. Très soucieuse des maux qui pèsent sur Homura, elle est parfaitement lucide vis-à-vis du comportement des siens comme de celui des autres clans et s'organise toujours dans l'ombre afin de limiter les dégâts. Certains la suspectent d'avoir assassiné Fujiwara Oda, et de nombreuses preuves mèneraient à penser qu'elle est coupable. Etrangement, elle rejette l'entière culpabilité sur Fujiwara Senchi.
À l'été 83, un shinobi d'Homura se rend au sein du temple souterrain découvert lors de l'attaque d'Oto sur Homura, en périphérie du Shogunat. Ses découvertes mènent le lieu à son scellement complet par le clan Uzumaki, ainsi qu'à l'amnésie du genin.
À l'été 83, 90 civils sont assassinés dans la bourgade de Rindо̄ par un homme se faisant appeler « le Boucher ». Au terme d'un combat qui se révéla être une victoire pour l'escouade envoyée par Homura, il fut assassiné par Yamamoto Janome au moment où il s'apprêtait à leur révéler les plans de l'Alliance. À sa mort, le pouvoir des fils noirs, le Jiongu, réapparu à travers le monde.
La venue de l'automne fut le théâtre de la plus grande attaque de l'Alliance contre le Shogunat d'Homura. Suite à la récupération d'Uzumaki Sadame – Jinchuuriki de Kyuubi que tous pensaient décédé – par les forces armées à la fin de l'été, l'Alliance se mit en chemin pour le reprendre par la force, de crainte qu'il puisse confier aux shinobis d'Homura tout ce qu'il connaissait malgré lui à leur sujet, lors de sa captivité.
Alors, si une escouade s'occupa de protéger le Jinchuuriki dans sa chambre d'hôpital, le reste du village, lui, dû s'occuper de Janome et de ses alliés qui tentèrent de mettre la Capitale à feu et à sang pour disperser leurs forces.
En hiver de l’an 82, Homura fut prise pour cible par les forces armées du Pays du Son qui attaquèrent de front la capitale de l’Empire. Rejoints par les autorités du Shogunat, les Genin firent face à de nombreux guerriers d'Oto, une dizaine de yokai éveillés ainsi qu'à Yamamoto Janome, qui se révéla chef d'orchestre de ce conflit. Alors que ce face à face tournait en défaveur d'Homura, Naga, un shinobi ayant rejoint leurs forces armées, s'énonça comme un traître qui avait enfin récupéré ce qu'il cherchait depuis toutes ces années. Il invoqua Kyuubi, le Démon Renard, avant de prendre la fuite avec Janome sur son dos... non sans avoir occis tous les yokai de ce dernier, comme pour le punir pour sa cruauté qu'il n'avait pas prévue au programme.
S'il y a bien un lieu dans lequel la mort peut survenir à tout moment, c'est bien au sein du Village Caché de la Brume. Depuis des années, afin de lutter contre le retard qu'eut prit le pays par rapport aux autres factions, les autorités de l'Eau se décidèrent à mettre au point une philosophie qui leur permettrait de rattraper l'avancement des autres factions. C'est notamment au travers de l'assassinat que ces derniers trouvèrent leur réponse et ainsi furent éduquées les jeunes pousses destinées à devenir les futurs shinobis de Kiri. A un style sanglant et sanguinaire, loin de toute valeur humaine.
▒ Chaque Shinobi doit être capable de mourir pour la Brume et pour ses habitants.
▒ Chaque Shinobi doit capable d'abandonner, de laisser mourir voire de tuer ses camarades si cela leur permet la réussite d'une mission primordiale.
▒ Chaque Shinobi ne dispose d'aucun sentiment personnel : ils doivent agir sous les ordres de la hiérarchie.
▒ L'entraînement de chaque shinobi doit être rigoureux et il doit toujours être au service de l'identité de la Brume.
▒ Chaque Shinobi doit servitude et obéissance à la hiérarchie, tout manquement sera vu comme insubordination.
▒ Chaque Shinobi doit tuer tous les adversaires qui se dresseront sur le chemin de Kiri.
▒ La Brume est l'alliée de Kiri, nul ne doit la remettre en question.
YUKI ZENRYŌ Yuki Zenryо̄, autrefois jeune membre du clan dont tous reconnaissaient le potentiel, devint chef de clan à la mort de Yuki Saburô en l'an 75. Très proche de la Mizukage, il lui assure son soutien inconditionnel et celui de son clan.
KAGUYA TAOSU Cheffe du clan Kaguya, Taosu est connue comme étant une guerrière redoutable et particulièrement avide de sang et de trippes. Supportant avec fidélité l'identité de ce clan depuis des décennies, elle est, malgré son apparence, extrêmement hostile, sournoise et meurtrière, si bien qu'elle est redoutée dans son clan entier. Elle éprouve une très forte rancœur envers Oboroge, la Mizukage, car sa simple présence a fait diminuer de manière importante son quota d'assassinats par jour.
SEIDŌ IMIFUMEI Personnalité émérite parmi les sabreurs, tout le monde au sein de Kiri connait Imifumei. Combattant redoutable maîtrisant Sо̄kо̄jikan, le Sabre du Temps, l'ensemble de Kiri le voit comme un shinobi imbattable. Il est vénéré de tous, car tous le connaissent comme un homme héroïque, portant de grandes valeurs d'espoir, de courage et de persévérance auprès des plus faibles.
Trois soldats de l'Eau sont approchés par Fuuha, une errante appartenant autrefois au clan Yuki dont elle a renié le nom. Si elle décide de partager le fruit de ses enquêtes sur la Brume sanglante avec quelques uns, d'autres n'acquièrent pas sa confiance – à l'image d'un certain archer jouant un double jeu, en faisant un rapport au Seigneur de l'Eau et à la Shodaime sur ses agissements.
Une escouade menée par Kaguya Bankichi permis à la Brume de repérer la trace de Shinchū et, au terme d'un affrontement difficile, de l'éliminer en le prenant par surprise. L'ensemble de l'escouade fut frappée par une marque maudite mystérieuse lors de son ultime râle.
À l'automne 83, Naga foule du pied le Village caché de la Brume en pénétrant dans la Tour de la Mizukage. Pressentant le danger qu'il représente, la Shodaime s'engage immédiatement dans un combat qui l'oppose à l'étranger, épaulée par la Brume sanglante qui, pour une raison que l'on ignore, ne parvient pas à le tuer malgré tous ses efforts.
Au sein du village, les autorités de Kiri se dispersent sur deux flancs : à l'Ouest, face à une yokai connue sous le nom de la Mariée sans visage ; et à l'Est, face à un homme nommé « Shuushin », un adorateur d'Izanagi qui se dit être immortel...
À l'hiver de l'an 82, Kiri souffrit simultanément la disparition d’un grand nombre de ses habitants et la désertion apparente de trois de ses éléments les plus prometteurs Les enquêtes menées révélèrent d’une part que les civils avaient été massacrés par des Yokais, dont le plus imposant était Shinchū, dit « le Yokai Originel », et d’autre part que les déserteurs avaient été tués par deux individus restés non identifiés, mais dont l’un d’eux manipulait une forme d'orage. L’hypothèse d’une alliance entre ces deux menaces n’était pas exclue.
Parmi les lieux les plus malsains et insidieux du Yuusei, Kumo s'y érige en maître. Faussement uni, le village est peuplé de shinobis qui ne souhaitent qu'agir pour leurs intérêts propres ou pour ceux des personnes pour lesquelles elles travaillent. Etrangement, cela est parfaitement assumé par tout le monde et ainsi sont éduqués les shinobis. En plus de cet état d'esprit, rédigé par le Daimyo en personne, Kumo dispose d'un Code de Renseignements que tout le monde doit consciencieusement respecter sous peine d'être sanctionné par le dernier. Evidemment, la crainte de ce dernier incite et invite tout le monde à les appliquer sans broncher.
ζ Chaque Shinobi doit être capable de mourir pour son Daimyo.
ζ Chaque Shinobi ne peut discuter des ordres de la hiérarchie. Aussi, tout manquement aux ordres du Daimyo est passible d'une peine de mort.
ζ Chaque Shinobi doit être capable d'accomplir toute mission, même si cela lui impose des sacrifices insurmontables.
ζ Chaque Shinobi doit s'entraîner en vue de récupérer toujours plus d'informations, et afin d'être toujours plus discret.
ζ Toute information récoltée doit revenir au Daimyo sans aucune exception.
ζ Toute personne surprise en train de comploter contre le Daimyo sera soumise à la peine de mort.
SHIRATSUCHI BAKU'EN Baku'en est, en plus d'être le chef du clan Shiratsuchi, l'homme qui les a relevé de leur condition de "parfaits petits soldats obéissants". Désireux de liberté et de justice, il est animé par une grande hostilité qu'il parvient à maintenir discrète pour restaurer l'honneur de son clan, qu'il estime bafoué depuis des décennies. Secrètement, il rêve de pouvoir mener une rébellion contre Koriki Tomio, au risque que cela mène à l'extermination des siens.
ABURAME YOKOSHIMA Fourbe, manipulatrice et très protectrice vis-à-vis des siens, Yokoshima est la cheffe du clan Aburame. Soupçonnée – sans preuves concrètes – par plusieurs personnalités d'avoir son nez fourré dans toutes les affaires, elle est autant admirée que crainte. En plus d'être une des rares personnes du clan Aburame à maîtriser les Rinkaichû, des rumeurs courent selon lesquelles elle serait à même d'agir efficacement, n'importe quand et dans tous les recoins du village.
INUZUKA “JINMENJUSHIN” Autrefois rejeton auquel l'on ne daigna pas donner de nom, abandonnée à la naissance au large du domaine en espérant que le nouveau-né pourrirait parmi les yokai pour être simplement née femme, celle que l'on connaît aujourd'hui sous celui d'une « bête à forme humaine » passa sa vie entière à lutter pour ne serait-ce que pouvoir voir une autre aube se lever. Les cicatrices comme les sévices qui marbrent son corps et son visages sont les reliques des nombreux affrontements qu'elle a endossé au cours de son existence, au point de devenir une vétérante du clan Inuzuka dont la force et la hargne était aussi crainte qu'elle était respectée. Les murmures des membres de son clan à son propos lui donnèrent, avec le temps, ce qu'une mère ne lui avait jamais offert – un nom ; celui de « Jinmenjushin », aussi rompue à la bataille qu'à la victoire. Une vieille et large balafre fend sa joue, faisant horriblement entrevoir l'arche de sa mâchoire jusqu'à son ossature, qu'elle arbore comme un trophée. À l'automne 83, elle invoqua une ancienne clause de son clan pour défier le frère de Getsumen – qui aurait naturellement hérité de son titre de chef de clan – dans un combat à mort pour obtenir le droit de guider les siens, ce qu'elle obtint en laissant derrière elle le dernier cadavre de cette lignée. Elle ordonna qu'il soit laissé à l'endroit où elle l'avait occis pendant deux jours, afin de faire passer son message : celui que les Inuzuka seraient désormais menés par une bête qu'ils avaient passés des décennies à renier.
À l'été 83, l'Alliance, menée par un Yamanaka inconnu, tenta de récupérer le Shodaime Raikage. Ils y parvinrent, mais ne purent le ramener en vie - Getsumen fut tué, alors inconscient, par un shinobi nommé Sumashâ.
Une attaque d'un Yokai dans le Domaine Aburame décima une partie du clan. Un kumojin et deux errants présents sur place, parvinrent à endiguer la menace et à en venir à bout, en le tuant avec une la dague d'annihilation des Aburame.
Un shinobi de l'Alliance maîtrisant un art shinobi inconnu s'apparentant à l'orage attaqua le Domaine Shiratsuchi pour tenter de capturer l'un des membres du clan. Celui-ci fut tué par un Shiratsuchi ayant libéré le pouvoir de la première pièce d'une arme mythique, retrouvée plus tôt dans l'année par les forces de Kumo. Sa libération généra une explosion titanesque qui ne laissa aucun survivant. À la mort de l'homme inconnu, le pouvoir de l'orage, le Ranton, réapparu à travers le monde.
Suite à de nombreux rapports attestant de la présence grandissante de yokai dans les montagnes, une escouade est envoyée par le Nidaime Raikage au début de l'automne 83 pour régler la situation – avant de réaliser que tout cela est dû à la présence de Corruption, l'un des quatre Shinobi Primordiaux, dont le sceau a été fragilisé.
Une seconde escouade est envoyée dans les profondeurs des monts de Kaminari, où l'un des Grands dragons est apparu dans le ciel, corrompu par les miasmes que laisse s'échapper le sceau de Corruption. Les kumojins se doivent alors d'affronter ces engeances sur les deux fronts, afin d'empêcher l'influence du Shinobi Primordial de s'étendre jusqu'au village, malgré le manque de coopération de certaines de ces forces...
À l'hiver de l'an 82, l'élection du Shodaime Raikage fit rage. Nommé presque unanimement, Inuzuka Getsumen prit le pouvoir et profita de son ascension pour tenter de mener un coup d'état contre le Daimyo, Koriki Tomio. Lui reprochant une cruauté sans nom qui punit, asservit et torture les innocents, une grande guerre civile éclata et le peuple Kumojin fut déchiré par l'affrontement des deux forces, alors que le Seigneur lui-même était présent.
Le parchemin se noircissait à mesure que Weihan remplissait l’espace. Ses mains étaient charbonneuses, tâchées de la craie minérale, fatiguées mais incessantes. Sur le sol, d’autres parchemins rejetés s’accumulaient à côté de sa table de travail. Le dessin tracé sur leur surface différent d’angle, de texture, parfois même de méthode… Mais la forme, elle… Elle restait toujours la même.
Spoiler:
Weihan reposait le fusain, posait ses mains galeuses sur la table. La poussière noire sur sa peau blanche semblait presque en harmonie avec le dessin… Et en fait, l’était. La lumière de la fin d’après-midi luisait dans les formes étranges de la créature qui le hantait. Une créature d’acier et de rouille, des yeux comme les étincelles de la forge. Il avait d’abord crû à un Yokai, mais c’était quelque chose… d’autre. Ancien, oublié.
Il l’avait senti s’infiltrer entre les psaumes de sa conscience, dès le moment où le manipulateur de métal avait explosé. Comme une présence indigène, un insecte dans la toile. Elle s’était glissée dans ses rêves. Elle était silencieuse et pourtant aussi bruyante que la plus dévastatrice tempête d’automne. Dans le jardin de sérénité dogmatique qu’était le mental de Weihan, elle était là. À attendre quelques choses, des dents de métal sur une fourrure de limaille. Elle n’avait qu’à attendre, car elle avait déjà prise sa place, l’avait taillé à coup de dents de sabre. Maintenant, elle pouvait attendre. Maintenant, elle –
Quelqu’un frappa à sa porte et Weihan se redressa, sorti de ses pensées comme jamais auparavant. Il en avait perdu le sens du temps, comme après un trop long repos. Il se relevait dans un grincement, balayant la poussière engouffrée dans son heaume. Il faisait son chemin jusqu’à la porte, claudiquant lourdement sous ses blessures en cours de guérison.
Il ouvrait la porte. « … Shinjiro ? »
Weihan ne l’avait pas revu depuis un moment. Pour autant, il avait beaucoup de respect pour l’épéiste, et inclina la tête pour le signifier. « Vous revoir réchauffe mon cœur. Je… Entrez. »
Seul la table de travail était embrumée de fusain, le reste de sa main d’un ordre et propreté spartiate témoignant de la discipline constante qu’était Weihan. Puisqu’il avait bâti sa forge, il n’y avait plus besoin de garder ses outils à l’intérieur de la maison comme autrefois. « Je… Laissez-moi vous préparer une tasse de thé. »
Tout en lavant ses mains, laissant l’eau devenir noire, il respirait métalliquement. « Vous étiez à l’hôpital lors de l’attaque. Qu’avez-vous vu ? »
Tout en mettant de l’eau à bouillir, Weihan se retournait. « Pardonnez mon impolitesse. Vous avez certainement vos propres raisons d’être ici. »
Les cadavres furent écrasés sous les décombres et leurs os s'étaient enfoncés dans le sol comme l'on plantait une graine. Leur sang pouvait servir à abreuver ces futures plantes et ces futurs arbres mais au vu des teintes qui habillaient et de la tristesse qui habitait les quelques autres éléments de cette route grise, il était légitime de se demander s'ils étaient vraiment vivants. Parfois, en tournant la tête, il pouvait voir la sécheresse ronger ces plantaisons. Autour de ces corps dont les trous et les organes visibles ne laissaient imaginer qu'une horreur, et de ces bribes de murs qui laissaient à penser qu'il s'agissait de ceux de l'hôpital, le ciel était rougeâtre et ses nuages étaient tout aussi sombres.
Il marchait, il croisait les ruelles maintenant dévastées et puis, les armes loties dans ses fourreaux, il progressait la tête baissée.
Parfois, il reconnaissait des visages. Il put trouver celui d'un de ses voisins, ou d'une dame qui vendait, il y avait de cela quelques jours seulement, des fraises et d'autres fruits rouges. A d'autres endroits, il voyait des enfants qui étaient dépourvus de toute joie et eux aussi, comme lui à ce moment, perdaient leurs pupilles sur les reliefs de la terre et maintenaient une mine terne, insipide. Il n'était plus le temps de l'ode à la joie ou d'un hymne salvateur, la tristesse avait empli les coeurs et la mélancolie avait emporté les vivants. Dans cette immense place où l'affliction régnait en maître, les morts ne pouvaient plus se complaindre car ils n'étaient plus ; les vivants, eux, se retrouvaient dévastés à l'idée de les avoir perdu.
Il reconnut les lieux. Il y était presque. Weihan n'était plus qu'à quelques pas mais les images qui tournaient dans sa tête ne semblaient vouloir cesser. Cette impuissance l'avait bien amoché.
Alors sous ce ciel écarlate dans lequel les étoiles n'avaient pas leur place, les espoirs mouraient. Tout semblait torturé sous les coups de la colère et de l'incertitude, de la frustration et de l'accablement. La lumière ne parvenait pas à atteindre l'esprit de ceux qui restaient et, bien qu'il aurait apprécié pouvoir les aider, il aurait été plus prudent qu'il pense à s'aider lui-même. Peut-être même était-ce pour cela qu'il l'avait choisi, lui. Parce qu'un casque avait beau cacher toutes les émotions, son immobilisme laissait ressentir un sentiment de contrôle, de calme, de stabilité.
Ce que beaucoup cherchaient, ces derniers jours.
Il frappa à quelques reprises, la poigne timide bien que suffisamment assurée pour être sûre d'être entendue. Et lorsqu'il eut l'autorisation d'entrer et qu'il le fit, en voyant son comparse, il s'inclina.
« Weihan... Je suis heureux de te voir, moi aussi. »
Ne s'étaient-ils pourtant aperçus qu'à quelques brèves reprises, ils cherchaient visiblement quelque chose mutuellement. Pour le Ryokyaku, c'était bel et bien une personne à qui parler, quelqu'un de si sobre et de si sûr qu'il pourrait sûrement trouver chez lui quelques paroles rassurantes.
« J'en prendrai volontiers, merci. C'est gentil. »
Mais son regard restait las, vide, observant le sol de sa demeure avec une insistance révélatrice.
« Je... », il déglutit lentement, le temps lui-même d'absorber les images qui continuaient de pulluler dans sa tête.« Beaucoup trop de choses... »
Il ne pouvait pas parler de la guerre, de ce qu'il en connaissait ; cela ramènerait n'importe qui de suffisamment intéressé en l'histoire à sa provenance d'Oto. Il prit quelques instants.
« Je ne viens pas que pour mon propre intérêt. Je viens aussi par sympathie, pour prendre soin des autres, parce que vous êtes mes camarades. »
Mais sa poigne, fermement serrée le long de son flanc, semblait vouloir dire que quelque chose lui pesait sur le coeur.
« Mais dis-moi, Weihan... à moi qui ne suis arrivé que récemment à Homura... »
...
« Est-ce que tous les ninjas d'ici ont l'habitude de voir autant d'innocents mourir, sous leur regard impuissant ? »
Son regard se perdait toujours plus loin dans les ténèbres, bien que les reliefs de l'habitat de l'Eien n'étaient pas plus profonds que cela.
« Est-ce que... est-ce que toi aussi, tu en as vu des centaines périr sous tes yeux, à un moment où tu ne pouvais même plus les protéger ? »
Ses pensées se mélangeaient avec les images, des conclusions se tiraient bien trop vite alors qu'elles se mêlaient encore aux doutes et, alors qu'il était encore empreint d'une charge psychologique bien trop grande, il tenta de trouver un peu de clarté.
Lui qui avait pourtant connu la guerre, jamais n'avait-il eu affaire à un tel massacre de masse sous ses propres yeux.
Comme des fantômes au milieu des hommes, songea Weihan. Shinjiro ne ressemblait à cet instant en rien à l’épéiste impétueux qu’il avait rencontré lors de la fondation de l’avant-poste d’Ame. Torturé et perdu, en marge de l’Éternité désormais. Et si les pas de l’armuré étaient incertains sur le sentier, perdre ne voulait pas toujours dire être perdu.
Il tourna le casque métalliquement vers son visiteur, le considérant quelques instants. « … Je vois. Votre sollicitude est louable, et plus qu’appréciée, soyez-en certain. »
Weihan inspira avant de reprendre la préparation du thé, écoutant l’homme attentivement, poussant dans l’arrière de sa conscience ce qui l’hantait, car les démons qui habitaient son collègue semblaient bien plus nombreux. « … »
Il pouvait comprendre le fond de la pensée de Shinjiro, car elle était logique… Sous les angles usuels. Weihan posait des tasses sur la table en faisant signe à son confrère d’y prendre place. « … Je l’ai vu, et bien davantage. À l’Arche, le métal a ravagé le quartier résidentiel. Le jutsu ennemi… était d’une amplitude inimaginable. Nous avons fait ce que nous pouvions faire. »
L’heaume baissait quelques instants. Il ne pensait pas uniquement à ceux qui avait péri à l’arche, mais également aux victimes innocentes de la guerre d’Oto, qu’il avait dû achever. Mais l’esprit dogmatique de Weihan ne considérait pas ces souvenirs avec la lourdeur des regrets ou des ressentiments, pas de la même manière qu’un hérétique du moins. « Je comprends votre situation. Regrettez-vous d’être devenu un shinobi d’Homura ? »
Une question simple. Tous ne servaient pas pour les mêmes raisons, et il y avait même ceux qui le faisait à contre-cœur. Shinjiro était-il l’un d’eux ? À accomplir son métier sans y éprouver fierté, devant l’horreur causée et observée. Weihan apportait une théière bouillante, versant le breuvage dans les tasses avant de s’asseoir à la table dans des grincements métalliques. «… C’est une grande responsabilité, d’être garant de la sécurité des habitants de ce village. Tout aussi grande est sans doute la honte d’échouer dans ce rôle… Mais… »
Le chuunin posait une paille d’acier dans sa tasse, alors que les grilles du heaume se penchaient vers le visiteur avec une certaine gravité. « … Je n’ai pas la même relation avec la mort. La Voie a conçu ce monde, et avec lui sa fin. Et cette fin n’est pas tragique en soit. Elle est l’ultime Paix. »
La Paix était son seul vrai objectif en ce monde. L’équilibre entre le chaos qui le rongeait, et le feu qui le purifiait. Dans les grilles du casque, les flammes sommeillaient. « Je n’ai pas échoué à les protéger, et vous non plus. Vous avez fait tout ce que vous pouviez pour eux. Le reste n’a jamais été en votre contrôle. Nous avons sauvé ceux qui devaient vivre. Les autres… Ils font partie de l’Éternité désormais. »
Weihan prenait une rasade de thé, la fumée caressant ses narines. « Ce n’est sans doute pas d’un grand réconfort pour vous, n’ayant pas la même vision du monde. Sans meilleure réponse, en voilà une que j’espère plus familière aux guerriers que nous sommes : j’ai foi en vous, Shinjiro. Et aux vies que vous avez protégées ou protégerez dans le futur. »
La Voie lui ouvrirait un chemin pour justifier les vies perdues. L’équilibre régnerait. C’est ainsi. Le silence prit sa place pendant quelques instants, Weihan posant ses avant-bras sur la table. « … Ces sacrifices ne sont qu’une autre courbe du chemin. Vous avez eu le courage de marcher le sentier que ce monde a mis devant vous, et sa gloire vous viendra, lorsque le moment sera venu. »
Weihan secouait la tête avec gravité. « Ce n’est pas pour autant une raison de nous reposer, impuissants. Devenons plus forts, chaque jour, pour mieux accomplir notre rôle dans la sauvegarde de cette cité. C’est ce que la Voie voudrait de nous. »
Ils coururent à ne plus s’en arrêter. Vêtu de blanc, dans cet océan de misère dans lequel baignait des créatures d'un noir de geais, ils étaient armés jusqu’aux dents et chaque rencontre se concluait par des échanges sanglants. La lutte fut rude. Les armes se confrontèrent à leurs membres et parfois, ces mêmes attributs monstrueux venaient écraser leurs organes entre eux. On y voyait une guerre abjecte entre les mots et les maux, une percée de ceux qui voulaient libérer et qui menaient un rude combat contre ceux qui voulaient faire sombrer. Il était bien connu que dans ce domaine, rares étaient les fois où les blancs étaient entièrement victorieux. Généralement, les démons avaient une facilité particulière pour envenimer les esprits.
Il s'assit, visiblement attentif à ce que Weihan pouvait bien lui dire, le regard toujours enfoncé sur le sol bien qu’il se permit quelques écarts. Lorsqu’il fallut bien attraper cette tasse qu’il venait de lui servir. Il l'apporta timidement à ses lèvres, laissant échapper quelques gouttes de ce thé, et resta discret encore quelques instants.
On ne pouvait que trop difficilement savoir qui allait triompher. Il n'était jamais facile de surmonter une épreuve si difficile.
« Être un Shinobi d’Homura est une grande fierté pour moi. Si je devais me plaindre, ce ne serait pas de ça. Ce serait de l’incapacité de l’homme à régler ses problèmes autrement que par le combat. »
Sa voix était douce et profonde à la fois. C'était quelque part un peu comme si son cœur et toutes les branches de sa sensibilité s’exprimaient à sa place.
« Mais je ne suis pas dupe. Le monde fonctionne comme ça et nous fûmes tous maudits par cette destinée dès le moment où nous sommes venus au monde. Moi même j'ai beaucoup tué par le passé, et si j’en cauchemarde à l'idée de recommencer, je le ferai à nouveau, autant de fois qu’il le faudra, si cela est nécessaire. »
Une moue s’afficha sur son visage, celle du regret, car s'il lui avait été possible d'épouser une autre voie, sûrement l’aurait-il fait.
Et puis, il réfléchit à l'étrange sagesse qui venait des lèvres du Chuunin. La Voie, il n’en avait jamais parlé et cela résonnait à ses oreilles comme une énième religion qui fut créée pour s’adapter à une énième façon de penser. Mais il n’en fut pas aussi critique et péjoratif que cela ; les croyances existaient aussi pour apaiser, et il y avait dans son absence de preuve la possibilité qu’elle existe. Ainsi existait-il avec elle la possibilité que ce futur soit tel que présenté pour tous ces gens.
Cela le rassura, quelque peu. Tout comme l'expérience d’un homme visiblement empreint de toute cette réalité, qui ne semblait pas éprouver plus de remords que cela.
« Tu as raison. Je ferai mieux de redonner toute la culpabilité à celui qui en est bien responsable, et d’endosser à mon tour la responsabilité de pouvoir un jour les protéger. »
Il sourit, maigrement, mais il était encore bien trop tôt pour avaler cet aigre leçon.
Il expira une bonne fois et avala bien plus de thé que précédemment. La confiance qu’avait l’Eien en lui lui réchauffait quelque part le cœur et, comme pour tout autre camarade, l'aidait à le faire sentir accepté auprès des shinobis du Shogunat.
« Je te raconte cela car tu as dû l'entendre. L'hôpital s’est effondré sur lui-même, emportant tous ceux qui y résidaient avec ses structures. L’ennemi à voulu se venger d'avoir perdu… et nous n’avons rien pu faire. Il manipulait d'étranges portails, il a transporté les bases de l’hôpital à une telle hauteur… »
Puis il soupira, une nouvelle fois. Sûrement ne valait-il mieux que de se rappeler des bonnes choses. Après tout…
« Enfin, nous avons sauvé Sadame. Nous attendons encore l’interrogatoire, j'espère juste que les informations qu'il aura à donner valaient toutes ces vies. »
Il s'étira sur son siège, tendant ses jambes et ses bras, étirant son cou aussi de manière passagère, et puis il revint planter son regard sur cette armure de glace. Il l’avait bien annoncé, il n'était pas là seulement pour lui-même.
« Et toi, j'ai entendu que vous aviez tué deux membres de l’Alliance. Félicitations, c'est une belle victoire pour le Shogunat. »
Il n’en rajouta pas plus, laissant le Genin à son tour raconter ce qui lui semblait bon. Car sûrement était-ce ce que la Voie désirait.
Weihan se contentait d’hocher de la tête avec humilité, mais aussi car pour une rare occasion, ses pensées tendaient à dériver. Vers l’écarlate et le gris. « … Je suis un pacificateur, mais pas un pacifique. Bien que je comprenne votre désir de mettre fin aux conflits, pour ma part je célèbre leur existence. C’est ainsi. »
L’heaume se redressait dans un léger grincement métallique, bien aux faits qu’une explication semblait nécessaire. « Je me désole que les remords vous assaille envers vos actes passés… Car je ne vois pas le chaos comme une malédiction, seulement un défi donné à l’humanité chaque jour. Je ne pense pas au sang versé, mais bien à la gloire de nos accomplissements. C’est là pour moi la seule manière d’honorer les sacrifices… Et les sacrifiés. »
Tant de vies perdues ou brisées, pour leur permettre de savourer une tasse de thé aujourd’hui. Il fallait regarder en avant, tout en portant sur ses épaules le fardeau du passé. C’est ainsi.
Ils parlèrent de l’hôpital et Weihan croisa les bras, pensif. Décidément, l’Alliance ne manquait de shinobis aux étranges talents. Ces hommes et ces femmes… D’où venaient-ils donc ? « Cela explique les lits de camps installés près des décombres de l’hôpital, et le manque de personnel soignant. Nous avons dû perdre bien des vies entre les quartiers résidentiels, et ceux affectés à l’hôpital. Ce sont des pertes douloureuses pour Homura. »
Sadame avait survécu. Weihan exhala métalliquement. Puisse sa vie valoir celle de ceux qui l’avaient donné pour la survie du personnage. « Sadame… Qu’est-il censé être pour nous ? Un phare sur les secrets de ceux qui maîtrisent les démons ? Quelle sera la suite… Devenir nous-mêmes les hôtes de ces créatures ? »
L’idée le faisait tressaillir, et il la chassa immédiatement de ses pensées, reposant la tasse. Ces créatures ne faisaient pas partie de la Voie. Les utiliser n’était ni une hérésie, ni une gloire. Tout dépendait du résultat final, peut-être. Comme tout le reste. « Je… Oui, une victoire et un avertissement pour Janome. Ni lui ni ses alliés ne sont aussi invulnérables qu’ils le croient, et je pense qu’il l’aura désormais compris. Pour autant… Une fois vaincus, il a utilisé une sorte de sceau explosif de forte densité pour achever ses propres alliés. Cela signifie qu’ils étaient au final sacrifiables. Peut-être même n’étaient-ils jamais censés sortir vivants de l’assaut… Le vrai sens de la manœuvre m’échappe tout encore. L’un était un puissant senseur. L’autre… Il manipulait le métal à sa guise. »
Weihan hochait de la tête… Tant de questions que la Voie n’avait pas encore répondues. Le regard de l’armuré erra en silence, jusqu’à se porter sur l’arme au fourreau que son invité arborait. Le chuunin la désigna d’une main recouverte d’acier. « Votre épée… Elle n’a rien d’ordinaire, n’es-ce pas ? Je ne suis pas senseur, mais je sais reconnaître le métal. Le vôtre semble… Tumultueux. Parlez-moi de son histoire. »
Sa curiosité était piquée. Il retournait sa paume. « Puis-je ? »
Trois feuilles. Elles se noyaient sous l'eau chaude et échangeait cette chaleur avec leur propre goût. Elles absorbaient toute l'humidité dans laquelle elles étaient bercées et dans cette douce enveloppe qui recouvrait le fond d'une tasse observée, par des pupilles valdinguées dans les questions et les réponses, elles reflétaient le visage usé du Voyageur. Les réponses de Weihan faisaient mouches. Elles atteignaient étrangement quelque chose en lui, un je-ne-sais-quoi de poésie, une teinte de charme et de grâce ésotérique qui l'inspirait.
Il y avait dans cette perspective très céleste un message qui lui était équivoque. Il était quelque part aussi amusé ; jamais n'avait-il rencontré quelqu'un qui trouvait de beauté en le chaos, d'attrait envers le désordre. Par la célébration mais surtout par la mémoire envers les défunts et les sacrifiés, il trouvait une voie qui lui convenait, dans laquelle il pouvait s'accomplir.
Il sourit tendrement devant son eau maintenant tiède. Peut-être n'était-il pas encore complètement restauré, mais cette idée lui avait bel et bien plu.
« C'est ça. Nous avons fait tout ça pour lui, avec l'espoir qu'il ne nous livre autant d'informations sur l'Alliance qu'il ne pourrait en détenir. Je pense aussi qu'indirectement, ça force les Uzumaki à nous devoir quelque chose. »
Il but une gorgée puis reposa sa tasse, doucement, sur son dessous de verre. Le même qu'il fit glisser lentement sur la table.
« Enfin... S'ils avaient ce sceau explosif sur eux, c'est qu'ils étaient conscients des risques encourus. Sûrement qu'au moindre désagrément, leur vie devait être sacrifiée pour le bien de celle de Janome. »
Il repensa à tout cela. Il semblait être le maître de l'échiquier, celui qui tirait toutes les ficelles. Celui dont la vie prévalait sur celle de toutes les autres, mais surtout, une vie qui était reconnue par ses pairs comme celle qui devait être sauvegardée, qui devait être sauvée à tout prix. Shinjirō ne connaissait ni Naga ni l'Alliance plus que cela, mais il en vint à se demander si le marionnettiste avait un rôle à accomplir en ce bas monde.
Ou si simplement, dans la mesure où il était haut placé dans la hiérarchie, il était tout à fait normal qu'il ne soit dans les derniers à devoir mourir. Sûrement était-il la clef de voûte de tout un fonctionnement... sauf s'il était le cerveau en personne.
Mais alors dans ce cas, qu'était Naga ?
Il fut interrompu dans ses pensées par la question de Weihan. Il écarquilla les yeux de surprises et puis, voyant sa curiosité et son intérêt bien placé, également soucieux d'en apprendre un peu plus sur sa propre arme, il répondit du tac au tac.
« Je... tu t'y connais bien en épée ? Laisse-moi te dire ce que j'en sais. Elle appartient à un ancien Dieu, maintenant réduit au statut d'esprit. Le dieu de la Tempête, Susanoo, le frère d'Amaterasu et de Tsukuyomi. »
Il la sortit de sa ceinture, le fourreau l'entourant toujours, et la posa directement sur le côté du Chûunin afin qu'il l'ait directement en visu.
« Je te déconseille de la toucher sans prendre de précaution. C'est un dieu vengeur qui est prêt à tout... même à m'abandonner s'il venait à sentir que tu as, à son goût, plus de potentiel que moi pour le libérer un jour. Il agit par rapport à ce qu'il ressent ; et ce n'est pas vraiment une bénédiction, il m'a octroyé des pouvoirs, certes, mais cela est au péril de ma liberté. Si je n'accomplis dorénavant pas ses désirs, il m'a dit qu'il pouvait me tuer sur le champ. »
Ses yeux se froncèrent. Il avait toutes les raisons de paniquer mais plutôt, c'était du défi qu'il y avait dans son regard.
« A ton avis, est-ce qu'il existerait un moyen pour que je reprenne le dessus sur lui en faisant quelque chose à la lame ? Est-ce que tu pourrais l'étudier et me donner ton avis ? Fais attention. »
Les précautions étaient données, et c'était quelque part un jeu qui se lança, car en un rien de temps, Weihan pouvait peut-être devenir le détenteur de la Lame de Susanoo. Et cela serait quelque part un soulagement pour l'Oto-jin, à ne pas en douter.
ESPRIT DE LA TEMPÊTE - SUSANOO-NO-MIKOTO
OBJET MYTHIQUE
Récupérée pendant la guerre à Oto entre des mains de soldats du Son, ce sabre prend en réalité la forme que l'ancien Dieu lui donne lorsqu'il s'associe à son nouveau porteur. Pour Shinjirō, il s'agit d'un katana d'une taille similaire à celui qu'il porte déjà. En plus de posséder l'âme de l'ancien Dieu des Tempêtes, Susanoo-no-Mikoto, ce sabre donne la possibilité d'envoyer des techniques Suiton de petites ou grandes envergures. Dans le cas où le shinobi possédant cette arme manipule le Fuuton, le Suiton et le Fuuton s'associent afin de générer à la place des tempêtes au pouvoir destructeur (concrètement, une technique de rang X pourra être créée par le joueur).
Cependant, quiconque possèdera cette arme sera sous l'emprise de Susanoo-no-Mikoto. En effet, l'Esprit peut se manifester à tout moment et punir son porteur s'il n'effectue pas ce qu'il souhaite. L'Esprit de la Tempête souhaitant se venger, le joueur devra forcément prendre en compte les objectifs suivant afin de ne pas subir le courroux de l'ancien dieu, à savoir tuer le Magicien, tuer quiconque injure l'Esprit ou l'Ancien Dieu, tuer toute personne appartenant à l'Alliance et tuer Izanagi, ni plus ni moins. Des objectifs peuvent être ajoutés à tout moment, mais ceux-ci appartiennent au lore de l'ancien dieu. Enfin, Susanoo-no-Mikoto profite de tous ses porteurs afin d'en chercher toujours un plus digne, plus fiable et plus puissant que le précédent, jusqu'à pouvoir trouver une personne dont il pourra s'emparer entièrement pour récupérer sa liberté. Obtenu dans Sous une Pluie de Sueur et de Sang Froid
« … Vous pensez donc qu’ils étaient aux faits de ces sceaux posés sur eux… »
Ce n’était pas si absurde, songea Weihan, mais posait une lumière différente sur eux. Être prêt à ce genre de sacrifice, peu importe la validité de sa cause… Cela témoignait de détermination, ou de folie peut-être. Mais sous l’ombre de la Voie, l’un et l’autre n’était que le même symptôme d’un seul destin.
Cela ne faisait pas d’eux de dignes guerriers, cependant. Pas lorsqu’ils avaient visé systématiquement des civils et tenté d’échapper à un combat direct. Qui sait s’il aurait survécu contre eux lors d’un honorable duel… Mais cette question resterait sans réponse. Ainsi la Voie l’avait voulu. « Je suis forgeron à mes heures perdues. Je ne pourrais espérer concevoir une arme de cette qualité, mais l’examiner est un bon moyen d’apprendre. »
Il écoutait l’explication du bretteur tout en se relevant, allant brièvement dans une autre pièce, revenant dans des grincements métalliques, des pinces d’acier dans les mains. Un mot prononcé par l’homme attirait son attention. « Susanoo… »
Shinjiro avait posé l’arme toujours en fourreau sur le côté et Weihan en inspectait d’abord la garde, tout en parlant. « Chez ceux qui pratiquent l’art du chakra dans sa forme pure et originelle, Susanoo est une figure emblématique. Nous la canalisons pour évoquer ce que nous pourrions appeler « la personnalité de l’âme ». Cette évocation est unique à chaque individu, mais prend toujours la forme d’une entité ayant une allure… Divine… »
Weihan souffla métalliquement, relevant la tête brièvement vers son collègue. « C’est relatif. Ma définition d’un dieu diffère. La Voie reconnait tolère l’existence de Susanoo, Tsukuyomi, Amaterasu et ces autres figures des panthéons populaires… À vos propres mots, comme des esprits vivant dans ce monde tout comme nous le faisons. Leur géniteur est le même… L’Éternité. C’est ainsi. »
D’autres spectateurs du sentier... Weihan observait avec attention l’arme avant de refermer les pinces sur la garde et le fourreau pour la poser sur la table. « Et quels sont les désirs qui l’animent ? »
L’idée que l’arme soit vivante le fascinait en vérité. Une hérésie née de l’impureté de l’homme… Ou de la quelconque créature qui soit capable de la tenir en main. La question de l’épéiste le fit hausser des épaules légèrement, presque instinctivement. Avec précaution, il utilisait les pinces pour retirer la lame du fourreau, lentement, l’heaume discernant lentement l’allure du métal. « Hmm… »
Les ondulations du métal, la manière dont les replis étaient brouillés, la tempérance de l’acier… Il n’avait jamais rien vu de tel. Et pourtant… « Elle est magnifique… Et pourtant, son identité ne semble pas liée à sa forme. Sa longueur, la taille de la garde… Parfaitement adaptée à votre morphologie… Ce n’est pas un hasard. »
Il n’en existait aucun, sous l’œil de la Voie. « Sa surface me fait penser aux eaux enragées d’un océan en tempête. Nul doute qu’elle a su s’adapter au navire qu’elle menace de faire chavirer à tout instant… Votre personne. »
Weihan reposait l’arme sur la table, considérant gravement Shinjiro avant de croiser des bras massifs. « Cette arme n’est pas née de la main d’un homme. Comme il le serait de mettre une tempête dans un verre d’eau, je ne sais pas s’il est vraiment possible d’avoir le dessus sur elle… Mais pour équilibrer le lien qui vous unit, vous devrez devenir plus semblables. Vous devez devenir plus divin… Ou elle, plus humaine. »
Des deux, il était relativement simple de percevoir ce qui était le plus réaliste. « Je vois quelques pistes à explorer. L’une est de réaffuter la lame, et faire de son tranchant le vôtre. Bien des forgerons vous diront que le tranchant d’une épée est son âme. L’idée n’est pas d’imposer votre volonté au métal, mais bien à l’humaniser. Faire de l’arme… La vôtre. »
Et l’autre… Weihan désignait l’autre partie de l’épée, le… « Le fourreau. Il est coutume de le fabriquer soi-même. Bien des légendes présentent le fourreau comme la volonté du guerrier, un symbole de son alliance avec son arme. Déployer l’épée devient un choix, et une responsabilité. C’est également une manière de l’honorer et de la respecter. »
Il souffla métalliquement. « Il y a une dernière option, mais celle-là n’est pas du ressort d’un forgeron. Un membre du clan Yamanaka serait peut-être en mesure d’entrer en contact avec l’esprit qui habite l’arme. Si tout le reste échoue, une simple et honnête conversation est peut-être la meilleure manière d’établir les barèmes de votre relation. Je connais une femme dotée de ce don… Une en qui vous pourriez avoir confiance. »
Weihan posait les pinces sur le côté, prenant la théière pour resservir du thé à l’autre homurajin. « Je ne serais pas trop inquiet de la voir me préférer comme porteur. Je suis aussi hérétique à ses yeux, qu’elle ne l’est aux miens… »
Shinjirō s'abreuva de tout ce que Weihan put lui apprendre. Il s'agissait de nombreuses informations qui confirmaient ce qu'il avait déjà pu voir ou comprendre, lorsqu'il avait récupérée la lame il y avait de cela quelques jours maintenant. Elle était le produit de la volonté de l'esprit. La forme qu'il avait dû vouloir prendre pour pouvoir être manipulée par ces mêmes mains, l'allure de ce qui devait être le plus facilement maniable et préhensible par l'ancien Errant.
Au fond de lui, le Ryokyaku sentait que le forgeron avait raison. Au-delà de tout ce qu'il avait pu déjà percevoir avec les récents événements, c'était son intuition gorgée de toutes ses connaissances qui le menait à se dire que l'Eien était dans le juste. Alors ces descriptions ne faisaient que confirmer ses pensées, mais surtout, ce qui l'intéressait d'autant plus, c'était les recommandations que pouvaient lui donner le Chuunin quant au fait de pouvoir dompter le sabre et l'Esprit. Son approche fut pertinente. Il s'agissait là de ce qui semblait être l'essence même de toutes les connaissances d'un homme de métier. Il nota précieusement dans sa tête toutes les possibilités, et il aurait été mentir que de dire qu'à ce moment-là il n'avait pas souhaité proposer à son interlocuteur de tenter de modifier le pommeau, de le refaire, lui ou la lame, afin d'humaniser cette même création. Pour dompter finalement cet esprit.
Un rire, profond et lointain, commençait à se faire entendre dans la pièce.
Shinjirō fut certain de l'entendre, mais était-ce finalement audible en dehors de la tête du porteur de l'Esprit ?
Du chakra émana en grande quantité du sabre de Susanoo-no-Mikoto. Il était dense et intense, rapide comme puissant, il prit rapidement la place dans la pièce au point où le Chuunin comme le Genin avaient tous les deux intérêt à se reculer s'ils ne voulaient pas subir un courroux prématuré.
Sa silhouette se forma. Elle était grande et imposante, comme ce que son physique laissait à entrevoir. Une montagne de muscle ; c'était la meilleure façon de le définir, lui qui se considérait comme un Dieu – et cela tombait bien, il l'était –, sa simple carrure laissait à comprendre qu'il venait d'un monde supérieur et sa simple existence remettait en doute toute la sécurité de la pièce. Ils avaient beau être à Homura, cette arme restait un danger public qui s'affirmait dès lors que la liberté du Dieu des Tempêtes lui paraissait compromise.
Alors, lorsque Shinjirō bondit en arrière pour prendre un peu de distance, titillant de sa main disponible le pommeau de son autre arme restante, il le toisa non pas avec défi. Mais avec crainte.
De ses multiples sabres, deux furent tirés de ses gigantesques bras afin d'en pointer un en direction de chacun des shinobis.
« Que vous arrive t'il, shinobis ? Votre arrogance est-elle si grande que vous souhaitez maintenant dominer un dieu ? »
Son regard fut lourd et il alterna entre chacun des deux hommes. Ses menaces n'étaient sûrement pas du vent.
« Je vous laisse une chance de vous rattraper, tous les deux. Le forgeron comme celui missionné pour me rendre ma liberté. Courbez l'échine, agenouillez vous et promettez moi allégeance et fidélité, si vous ne souhaitez pas voir votre crâne séparé de vos torses. »
Le regard de Shinjirō se fit déjà plus craintif. Car il était celui qui devait vivre avec Susanoo-no-Mikoto. Et il savait qu'il ne pouvait pas le fuir. L'Eien, lui, était déjà plus libre. Mais il ne faudrait à l'avenir qu'un moment de maladresse et d'insouciance pour que l'Esprit ne s'en prenne à lui.
Ses dents restèrent crispées et sa tête se courba naturellement vers l'avant. Il savait dorénavant qu'il ne pouvait plus compter que sur lui-même pour espérer un jour renverser Susanoo. Peut-être que cette occasion était d'ailleurs la bonne pour en apprendre plus sur son pouvoir, mais cela ne fonctionnait que s'ils ne mourraient pas. A la moindre erreur, la fin se présenterait bien vite.
Tout changea trop vite. L’instant d’avant, il examinait la lame de Shinjiro, sa tasse de thé à la main. Le suivant, l’arme se mettait à émettre une immense quantité de chakra subitement, une pression spirituelle qui rendait l’air même lourd et pesant. L’effet de surprise l’avait fait quelques pas d’acier en arrière, la théière renversée éclatait sur le sol dans des morceaux de porcelaine usée.
La voix résonnait dans la pièce et l’heaume grinçait en se redressant. « … »
Le chakra se rassemblait pour prendre une forme humaine et avec une certaine curiosité, Weihan observait la scène progresser. Tant de chakra rassemblé dans un simple outil de métal… Mais rien n’était aussi simple. Ce sabre avait été conçu d’une manière spécifique… Et surnaturelle. « … »
La voix, les mots, la menace, dans l’ordre. On ne pouvait nier l’électricité dans l’air, cette impression que l’être devant eux pouvait mettre actes à son invective. Et pour autant, Weihan était captivé. Mais…
Il posait une main sur l’épaule de Shinjiro. « … Et c’est ainsi qu’est un dieu à vos yeux, mon frère ? »
Les mots avaient tranché l’air froidement. Ils n’étaient pas ceux d’un homme en vénération, mais bien d’une conviction qui dépassaient les opinions. « Car des miens, un dieu n’aurait nul besoin de prendre la forme imparfaite qu’est l’humanité. »
Dans les ombres du heaume, des flammes écarlates brillaient faiblement. « Un dieu n’aurait nul besoin de menacer, de parler, ou même d’agir. Un dieu n’aurait ni colère, ni tristesse, ni joie ni sagesse. Il n’aurait besoin d’ambitions, encore moins de personnalité. »
Il fallait remarquer durant cet échange que Weihan s’adressait uniquement à Shinjiro et non l’avatar de son arme, l’ignorant presque totalement. Son attention se portait enfin vers Susanoo. « Non… Vous êtes tonnerre… Et je ne sers que la foudre. L’Éternité. C’est ainsi. »
Weihan croisait des bras massifs. « Et c’est à votre avantage. Il n’a jamais été question de vous dominer, mais bien de vous rendre plus compatibles. Adopter des dimensions idéales à Shinjiro n’est pas suffisant pour faire de cette épée, votre épée. »
Le chaos n’amenait jamais que le chaos. « Mon art est de vous rassembler pour atteindre votre plein potentiel. Que Shinjiro continue d’être votre esclave m’est sans conséquence, mais il n’accomplira rien une fois mort, que ce soit de vos mains ou celles d’un adversaire qui sera motivé par l’honneur et non la peur. »
Il souffla métalliquement. Il paraissait confident, mais sous l’armure Weihan tremblait légèrement. Être convaincu dans sa foi ne voulait pas dire qu’il était autre chose qu’humain. Et la peur était un sentiment de l’humanité. Pour autant, son appréhension était celle d’un homme qui tentait de dicter à l’orage sa conduite. « Laissez-moi vous affûter et concevoir un fourreau digne de ce que voulez accomplir. Le reste m’indiffère en tant que forgeron. Je ne suis pas là pour sauver votre serviteur de son destin. C’est ce que la Voie voudrait. »
Weihan paraissait bien calme aux côtés du Ryokyaku. Shinjirō n'envisageait pas une telle confiance. Cette arme, elle restait toujours avec lui. Elle pouvait agir, réagir aussi si elle le voulait, elle pouvait le trahir à tout moment et faire de lui son pantin. Peut-être même pouvait-il prendre contrôle de lui à tout moment afin de s'incarner en sa personne, même si cela semblait avoir des répercussions qui lui étaient indésirables. Enfin, elle était une source de l'un de ses pouvoirs ; une technique bien puissante qui avait fait ses preuves lors de la guerre à Oto lorsqu'elle fut capable d'en renverser bon nombre d'entre eux sous une vigoureuse tempête.
Alors son esprit se divisa en deux possibilités. Ils pouvaient tenter de se dresser contre lui, de choisir la manière forte. Lui qui était sous la forme d'un esprit, il était bien moins fort que sous la forme de dieu. Ses pouvoirs devaient être bien moins développés, si bien que le Ryokyaku pouvait imaginer qu'il existait un monde dans lequel Weihan et lui pouvaient être capable de le battre. Il n'y avait qu'un seul problème. La victoire n'amènerait rien, il n'en tirerait aucune forme d'asservissement ou de camaraderie, il continuerait de vivre avec le risque que l'Esprit ne le possède ou ne le tue lorsque la situation l'avantagerait.
Ses mots furent lourds, tout comme ceux de Weihan qu'il pesait délicatement. Lui prêter trop d'attention, cela signifiait également subir le courroux de Susanoo-no-Mikoto. Il ne réfléchit pas plus longtemps que ça, il fronça les sourcils, visiblement embêté, et plutôt que de tenter de négocier avec cet être supérieur, il s'effondra sur ses genoux. Son torse se baissa également, ses bras se plièrent jusqu'à ce qu'il ne tombe en position de soumission. Enfin, son front épousa le sol. Sa tête, baissée, incarnait toute la position qu'il voulait démontrer. Il n'était définitivement pas en position de négocier avec une telle personne.
« Je ne pense pas que cela soit négociable, Weihan. Il en va de ma survie. », commença t'il doucement.« Il se moque bien que nous soyons compatibles. Si je meurs, il ne fera que trouver quelqu'un d'autre. »
Puis il éleva sa voix afin que l'Esprit ne l'entende clairement.
« Je vous présente mes excuses. Toute ma voie suivra l'objectif de vous libérer et de vous rendre votre puissance d'antan. »
L'ancien dieu rigola de vive voix, se moqua effectivement des deux Homurajin.
« En voilà de belles paroles qu'il te faudra tenir sans le moindre écart. »
Toujours en position, le Ryokyaku réfléchit vivement et continua.
« Mais je pense que Weihan voulait dire que si nous sommes plus unis, nous avons plus de chance que cela nous serve à tous les deux. Surtout si je vous libère. Surtout si je ne serai de toutes manières jamais en mesure de vous tenir tête. »
L'Esprit songea. Il avait beau être extrêmement fort et détenir une puissance remarquable, il n'en restait pas moins un personnage qui ne disposait pas d'une intelligence sans faille. Il resta muet quelques instants, réfléchissant à tout ceci. Sûrement prenait-il également en compte bien des informations qui ne pouvaient être connues des deux Homurajin, mais il finit par rétorquer.
« Alors dis-moi, jeune shinobi. Que pourrais-tu bien faire que mes talents ne maîtrisent pas déjà ? »
La lame était forgée selon son propre désir, selon sa propre capacité à pouvoir changer de forme autant qu'il ne le voulait. La question se posait ainsi, qu'est-ce que l'Eien voulait faire davantage ?
La réaction de Shinjiro ne put inévitablement que décevoir Weihan. Le voir se prosterner envers cette créature était révulsant, même si le heaume de l’armuré le cachait relativement. L’épéiste faisait-il cela par simple envie de survie ? Mais quelle vie étais-ce que de vivre sous le joug d’un esprit aussi orgueilleux que ce faux Susanoo ? Car une chose lui semblait certain : cet esprit n’avait rien d’un dieu.
Les explications de l’homme ne le convainquit guère davantage, et Weihan se contenta de croiser les bras en silence, sans répliquer. Le voir mentionner une voie, ici chez lui, acheva de le dégoûter. L’hérésie de la chose... Tout ce qui le retenait d’attaquer la créature était cette certitude qu’elle tuerait Shinjiro bien avant que Weihan ne puisse l’achever. Et puisqu’il était un homurajin désormais, causer sa mort inutilement était un déshonneur au guerrier qu’il était. « … »
L’esprit semblait complaisant. Et les mots de l’épéiste… Évocateurs. Essayait-il de gagner du temps ? De survivre jusqu’à ce qu’il soit assez fort pour vaincre cette chose ? De battre en retraite pour combattre un autre jour… Peut-être. Weihan n’aurait jamais été capable d’une telle arnaque.
Il fut tiré de ses pensées alors que la voix caverneuse se tournait une nouvelle fois pour lui. Le heaume resta immobile quelques secondes avant de se relever vers l’immense esprit dans un grincement métallique. « …J’ai déjà fait mon offre. Vous avez le talent de façonner l’arme qui vous contient, mais cela ne fait pas de vous un forgeron. Vous n’êtes pas humain, et par conséquent, cette épée est inhumaine. »
Il expira métalliquement, jetant un regard sur le côté. Weihan fit de son mieux pour ne pas céder à la colère, mais sa main métallique se refermant sur le vêtement de Shinjiro pour tirer vers le haut. « …Relevez-vous, bon sang. Esclave ou non, vous êtes chez moi, et un invité. »
Le heaume se retournait vers Susanoo. « Sans égard à ce que vous êtes censé être, pour le moment vous êtes cette arme. Si celle-ci reste inachevée aux arts de l’humanité, que cela veut-il dire de vous ? »
Quelques secondes. « J’ai une certaine expérience avec les armes hors de l’ordinaire. Je pense pouvoir canaliser vos pouvoirs de manière à ce que même un médiocre shinobi tel que Shinjiro puisse en tirer le plus grand potentiel. Là est votre meilleure chance de réaliser… Peu importe ce que vous comptez faire. »
Weihan soupirait en se penchant pour ramasser les morceaux de porcelaine brisée. Cette théière lui avait été donné par Urumi, jadis. Cela le dérangea bien davantage qu’il ne l’aurait voulu. « Votre objectif ne m’importe guère, mais si vous ne l’avez pas accompli depuis tout ce temps, il est peut-être venu le moment de changer votre perspective. Qu’avez-vous à perdre ? »
Sa main repoussa celle qui tenta de le soulever. Weihan ne comprenait pas, aussi arrogant pouvait-il être, qu'il soit chez lui ou où que ce soit dans le monde, l'Esprit d'un ancien Dieu devait être craint tant qu'il ne pouvait pas être dompté. Le Ryokyaku tentait de ne pas être dupe, il ne s'imaginait pas un seul instant que lui et Weihan, même en travaillant ensemble, pouvaient rabattre le caquet de Susanoo-no-Mikoto. Ils n'étaient à côté de lui que des insectes insignifiants. Pouvaient-ils se moquer de sa situation d'âme scellée au sein d'une arme que cela ne changeait rien. Il n'était pas en position de force ultime, mais il restait en position de force. C'était cela que le Voyageur craignait.
Alors en repoussant cette main qui avait tenté de le tirer vers le haut, il tomba à genou sur le bois du sol. Il ne fut plus aussi prosterné qu'il ne l'était auparavant, toutefois, il restait dans une position de faiblesse. De quelqu'un qui préférait serrer fortement le poing jusqu'à ce que la situation ne passe, de ravaler cet orgueil qui pouvait être le sien. Parce qu'il l'avait appris à ses dépens lors de la guerre ou même lors de sa propre éducation. Le caractère ne faisait rien. Il n'y avait que la puissance qui comptait.
« Je pense que tu ne comprends pas. »
Il redressa d'autant plus son torse comme sa tête se fit toujours plus haute, au point de côtoyer le plafond. Il redressa son bras qui portait son arme et, rangeant d'abord dans son fourreau celle qui menaçait Shinjirō, il leva simplement l'autre en l'air.
« Les arts de l'humanité sont risibles à côté des arts divins. Tu as l'insolence d'imaginer que ton art est supérieur au mien. Laisse moi te corriger, petit être. À côté de moi, tu n'es qu'insignifiant. Ma condition de Dieu Scellé n'y change rien. Tu n'es qu'un pathétique humain. »
Son chakra se fit extrêmement dense, tout à coup. Les murs tremblaient sous la concentration de chakra qu'il laissait échapper de son corps. Tout partit de son arme, et plus les secondes passaient, plus cette même force commençait à imprégner l'espace. Le Ryokyaku et l'Eien ne s'y trompaient sûrement pas. Il s'apprêtait à exterminer cette place comme si elle n'était rien, ce qui emporterait à la fois les deux ninjas, mais aussi tous les civils aux alentours.
Le Chûunin s'écria, la main levé, la voix portant si fort qu'elle défia le bruit des tremblements.
« Tu mérites- » « LES UZUMAKI ! »
Il s'élança vers le sabre de Susanoo-no-Mikoto, celui qu'il avait formé pour lui.
« ILS EN SONT CAPABLES, J'EN SUIS SÛR ! »
Sa paume attrapa fermement le pommeau de l'épée et il y concentra autant de chakra qu'il y pouvait pour tenter de contenir le Dieu.
Susanoo s'interrompit le temps d'un instant.
« Mh ? »
« S'IL VOUS PLAIT, IGNOREZ LES PAROLES DES IGNARES, ELLES SONT INDIGNES DE VOUS ! »
Les deux restèrent dans cette position. L'un fut en position de tout déclencher à tout moment, l'autre faisait de son mieux avec son chakra pour éviter que le pire ne se produise. Mais le Ryokyaku pouvait-il réellement éviter le massacre ?
« ET PENSEZ À VOTRE LIBERTÉ. JE VOUS Y MÈNERAI. J'EN AI LA POSSIBILITÉ ! »
Le dénouement dépendrait sûrement de ce que Weihan en ferait.
Tout ce que Weihan pu faire en vérité, ce fut de se retenir de s’exclamer à la mention « d’arts divins ». Cela aurait probablement été une erreur fatale. Mourir au nom de la Voie aurait été un honneur plus qu’acceptable… Mais l’Éternité était loin de ce qui avait lieu en cette pièce. L’armuré l’avait senti dès l’instant où Shinjiro avait refusé de se relever. Le guerrier se surprit à avoir pitié de l’ancien vagabond, un sentiment qui n’aurait jamais dû exister entre lui et un autre shinobi de la cité.
Un pathétique humain… Certes, la Voie n’aurait pas été plus clémente. Pour elle, l’homme n’était qu’une autre création, un autre grain de sable dans l’océan de son cosmos. Pour autant… Elle n’aurait pas entretenu de jugement à son égard. Et surtout, elle aurait respecté l’humain par ses actes et non son simple état.
De voir ce « dieu » regarder de haut qui il était, dans cette maison qu’il avait construit de ses mains, à côté de la forge qu’il avait érigé à la sueur de son front, dans cette capitale où il avait versé son sang pour la défendre… Weihan songea qu’il n’aurait laissé aucun homme lui parler ainsi, pas sans défendre son honneur à la pointe de sa hallebarde. Et à quelque part, qu’il soit autre chose n’y changeait rien. Mais il y avait plus en jeu. Notamment que Shinjiro ne semblait pas être prêt à ce choix. « … »
Le plancher sous ses pieds tremblait. Il allait attaquer. Weihan mit un pied en arrière, en position de combat. S’il devait mourir, ce serait en tant que guerrier. S’il réussissait à briser l’épée avant qu’il ne déchaîne ce qu’il préparait… Un plan sans vrai potentiel de succès, mais ça n’allait pas l’empêcher d’essayer.
Du moins, c’est ce qu’il aurait fait si ce n’est des actes de Shinjiro. Il se mettait en travers du chemin, en pleine supplique. C’était… Grotesque. Injurieux. Et surtout, désespéré. Mais c’était peut-être exactement ce que la créature voulait, si on en croyait à sa soudaine hésitation. « … »
L’air était suspendu, un nuage près à relâcher la tempête à tout moment, le statique vibrait dans chaque parcelle, rebondissait sur son armure. Plusieurs secondes de silence passèrent, avant que lentement Weihan ne se redresse de sa position dans le grincement habituel qui suivait ses gestes. « …Leurs talents sont prodigieux. Puisse les Uzumaki vous aider. Car j’en serai incapable. »
Ses deux mains étaient durement agrippées sur le pommeau de sa lame. Shinjirō avait fait l'erreur de penser un instant qu'il aurait pu prendre le dessus sur cet esprit avec l'aide d'un forgeron, mais c'était sans compter le caractère infecte qu'était celui de Susanoo-no-Mikoto. Il aurait dû s'y attendre. Jamais un être divin n'aurait voulu s'associer avec un simple humain, jamais n'était-il question de ne faire qu'un avec eux, leurs existences étaient bien trop opposées pour songer un seul instant qu'ils ne puissent s'unir. Ils n'étaient bons qu'à exister sous la forme la plus connue. Les humains devaient croire et prier désespérément en les dieux, et aucune autre forme ne pouvait se réaliser.
Sous les mots de Shinjirō et sous les quelques de Weihan, l'esprit baissa son arme. La pression chakratique disparut et le corps du Voyageur se laissa tomber sur le sol, visiblement à bout de force. Que cela soit psychologique ou physique, les derniers jours qu'avait pu vivre le shinobi l'avait éreinté et il n'était pas question d'en rajouter une nouvelle couche. Il respira lourdement, son sabre entre les mains, Weihan non loin de lui, la situation maintenant apaisée. Et même si c'était encore le cas, il savait qu'il devait encore continuer à peser ses mots.
« Je... je suis désolé. »
Il continua de souffler fort, et se redressa petit à petit, autant qu'il le pouvait.
« Ma venue était égoïste, j'avais besoin de parler. Et même en faisant cela, j'ai failli détruire complètement ta maison. »
Il se mit debout, s'étira en fermant les yeux, rangeant son arme dans son fourreau, là où elle appartenait. Il prit directement la position de la porte, sans plus attendre, car il était bien déterminé à rattraper ce mal qu'il avait causé. Et surtout, à laisser l'Eien seul dans un moment où il devait être plus qu'agacé.
« Je te remercie pour ce que tu as fait pour moi. »
Et puis, en guerrier vers un guerrier, il conclut par ce qui lui semblait être juste.
« Je t'en dois une, Weihan. Si tu as besoin de quoi que ce soit, je serai ton homme. »
Il le salua, avant que ses pas ne traversent sa porte. Il avait aujourd'hui fauté, mais il avait surtout appris ce que cela faisait de s'en prendre plus sérieusement à Susanoo-no-Mikoto. Tout ce qui pouvait le conforter à l'idée d'aller se rendre auprès des Uzumaki.