Rien à l’horizon. La partenaire d’Hidemi fit son apparition dans son dos. Même si la kunoichi avait l’habitude d’être alerte, au centre d’un lieu de passage, elle ne s’attendait à entendre une voix la saluer provenant de derrière elle. En effet, on l’avait prise par surprise. Elle se retourna rapidement. Une jeune fille qui semblait plus ou moins de son âge se tenait devant elle. Arborant un carré noir, son visage rond possédait quelque chose de vivant. Bien que les deux genin auraient pu se ressembler et faire la paire : deux brunettes des rangs des shinobi de Kumo. Cependant, l’une portait une beauté vive et l’autre, plus conventionnelle, semblait pâle et éteinte. L’une souriait, tel le jour, bien tenue et fascinante sur ses jambes, prête à vivre son rôle sur cette terre, l’autre, fantomatique, telle la nuit, restait indifférente et flegmatique, et donnait cette impression qu’elle pouvait s’envoler à tout moment. De l’extérieur, cette rencontre paraissait rassembler deux côtés opposés d’une même pièce.

Hidemi le pensa : cette jeune fille était très jolie et bénie de vitalité. Mais, peu intéressée par autrui, elle ne scruta pas plus longuement sa partenaire. À vrai dire, au vu de la teneur de la mission, il n’y avait aucun risque qu’elle se retrouve face à quelqu’un en qui elle allait devoir placer sa confiance. Il semblait plutôt qu’elles allaient être sur le point de régler une affaire de tapage. Du moins, c'est ce que cette mission laissait transparaître.
« Superbe ?... » s’interrogea le papillon bleu. Elle leva malgré elle un sourcil. « Si tu le dis. » conclut-elle sans vouloir exprimer le fond de sa pensée à une parfaite étrangère.
Elle rangea d’un geste machinal le papier qu’elle avait agrippé en attendant l’arrivée de son acolyte du jour. Elle entama une présentation exempte de cérémonies ou d’inclinaison ; une façon professionnelle et neutre de commencer cette mission.
« Je suis Hirai Hidemi. »
Sans broncher, elle suivit les directives de la dénommée Seijuu Miko. Son enthousiasme la laissait sceptique. Était-ce cela, l’ironie ? Ce n’était pas la première fois qu’Hidemi avait des difficultés à déceler le second degré ou les passions chez les autres. Pourtant, elle manquait encore d’expérience en la matière. Pour éviter de faire un faux pas, elle préféra alors demander d’emblée si cette « spécialité » dont parlait la Seijuu était vraiment quelque chose de réel et d’important à ses yeux. Non pas que cela l’intéressait particulièrement, mais pour le bon déroulé de la mission, il valait mieux tout mettre en place pour prévenir des désagréments inutiles.
« Je ne savais pas qu’on pouvait se dédier à la nourriture ou aux conflits autour de la nourriture. » déclara la kunoichi, tandis qu’elles avançaient vers le centre-ville. Pour la stabilité de la société, il fallait bien que certains se désignent à des tâches internes au village des Nuages. Cette jeune fille avait peut-être choisi cela pour demeurer au sommet des montagnes et éviter d’y redescendre pour des raisons qui lui importaient.
« Je préfère te prévenir, ce n’est pas ma spécialité. » Hidemi aurait pu rajouter qu’elle détestait écouter les jérémiades et qu’elle n’était pas à l’aise avec les affaires de communauté, mais selon elle, ce n’était pas utile au bon déroulé de leur besogne.
« Tiens, les deux restaurants se trouvent dans cette rue. » termina-t-elle en désignant la perpendiculaire droite dans laquelle les deux jeunes femmes devaient s’engouffrer. « Toi qui es une spécialiste, par quel restaurant veux-tu commencer ? »

Le papillon bleu se sentait prête à commencer cette mission qui ne l’enchantait pas particulièrement. Comprendre les autres est si difficile.

Cependant, la jeune fille ne se doutait pas qu’elle allait vivre cette situation de mécompréhension aussi rapidement. En effet, elles n’avaient pas encore pénétré dans un des établissements, qu’Hidemi perçut que sa partenaire réagissait de manière disproportionnée face à ses dires, par rapport à ce qu’elle attendait. La spécialiste des conflits comestibles semblait dérangée par les propos de l’introvertie. L’existe solitaire que la kunoichi au papillon menait la condamnait régulièrement à subir ce genre de situation.

« Je… » Hidemi hésita. Si elles devaient se comporter comme des médiatrices dans un litige tiers, il valait mieux endiguer un contentieux précédent entre elles.
Pourtant, la dénommée Miko ne parût pas attendre une réponse à ses questions que se trouvaient être bien plus rhétoriques qu’autre chose. Elle s’excusa, dévoilant ainsi une empathie que ne connaissait pas bien la kunoichi au papillon. Décidément, cette partenaire la surprenait bien plus qu’elle ne l’attendait. D’ailleurs, cette dernière admit ensuite que cette affaire n’allait pas forcément relever de quelque chose de si nutritionnel que cela, puisqu’il allait probablement encore s’agir d’argent. Hidemi ne savait pas si elle admirait ce comportement ou si elle le trouvait vraiment trop dangereux pour une kunoichi de Kumogakure, le village de l’information. La franchise et les émotions brutes de Miko la fascinaient. Mais, ne craignait-elle pas, en dévoilant ainsi ces sentiments ou même ces spécialités, de se mettre un jour en danger ? La jeune fille au papillon avait appris au palais que la manifestation de l’âme ou de l’être pouvait aisément être utilisée contre soi dans le futur. Sa solitude et le silence de ces anciennes relations palatiales lors de sa formation à l’académie avaient fini d’enterrer toutes sortes d’émotions ou de franchises chez elle. D’ailleurs, ces passions que déployait Miko, telle une tornade, paraissaient gratuites. Cette dernière oublia presque cet échange pour s’engouffrer direcetement dans la rue des restaurants, laissant Hidemi là, stupéfaite de son énième faux-pas vers la compréhension des relations humaines.

Cette dernière se mit à courir un peu pour rattraper sa partenaire.
« Excuse-moi. » dit-elle. « Tu sais… tu parles de spécialité, mais… au moins tu sais que tu en as une. Dis-toi que d’autres ne savent pas encore en quoi ils se démarquent. »
Hidemi marchait désormais aux côtés de Miko.
« Enfin… Non, je n’ai jamais eu besoin de voler. D’où je viens, il était impossible de réussir un larcin. Si tu en exécutais un… Tu ne vivrais pas assez longtemps pour ouvrir tes yeux le lendemain. »
Son regard s’assombrit au souvenir de sa vie de servante au palais du daimyo. Servir était sacré et honorifique. Leur position face à ces personnalités qui dirigeaient le Pays leur interdisait même de regarder dans la même direction que ces gens-là. Tu ne regarderas jamais un sama dans les yeux. Respirer leur air était déjà un cadeau.
Elle revint à elle après quelques secondes de réminiscence et espéra avoir réussi ainsi à calmer une quelconque tension entre elle et sa partenaire.

Elles arrivèrent devant le petit restaurant. Il ne semblait pas offrir énormément de place, mais son allure chic et boisée laissait entendre que ce lieu figurait parmi les incontournables du quartier, pour une clientèle allant de moyenne à aisée. Les kunoichis se trouvaient être attendues non pas par un gérant, mais par toute une famille qui trépignait d’impatience. Ils jetèrent tous un œil aux bandeaux des deux demoiselles. Celui d’Hidemi était porté à la ceinture.
C’est avec intensité que commença cette mission. Hidemi se voyait déjà devoir apaiser ses paroles fortes et franches et détestait cela à l'avance. Elle tentait de ne rien laisser transparaître, mais intérieurement, l’associable se trouvait déjà épuiser. Quand Miko déclara qu’elle allait goûter le Donburi alors qu’elle-même allait devoir écouter les plaintes, la kunoichi au papillon lui lança un regard de haine. Cette dernière le lui retourna pleine d’espièglerie. Hidemi n’avait plus qu’à se résigner. Elle joue bien son cette Miko. Elle a raison, à la guerre comme à la guerre, il faut y aller.

Le vieillard et le gérant se dirigèrent en diapason vers la pauvre taciturne, tandis qu’une femme alla installer la facétieuse à une table.
« Très bien… Euh… On va reprendre depuis le début. » tenta Hidemi pour calmer les esprits afin d’entamer une approche plus raisonnable. « Pouvez-vous reformuler vos accusations ? »
La modération de la jeune femme ne changea rien à la véhémence générale.
« Nous possédons une recette de Donburi qui nous vient de l’ère où les shinobis n’existaient pas encore. Certains manipulateurs de chakra venaient reprendre des forces en prenant un bol dans notre maison. C’est la meilleure recette de Donburi de tout le pays, je vous dis, si ce n’est du monde ! Encore aujourd’hui notre maison est fière de servir ce plat aux shinobis et aux Kumojin. Elle possède un ingrédient secret ! Et voilà pas, que, certains clients nous rapportent que le Donburi de la maison Tsubaki a changé et qu’il ressemblerait particulièrement au notre.
- Oui, voilà, exactement. » se sentit obliger d’ajouter le vieillard.
« Il n’y a qu’une explication possible…
- Oui… Ils ont volé mon carnet de recette ! Je l’avais… Je l’avais… Il n’est plus là ! »

Hidemi resta impassible face à tant d’emportement. Néanmoins, si un carnet avait disparu, ce larcin culinaire prenait une forme plus concrète.
« Vous voulez dire que quelqu’un est entré par effraction chez vous pour vous voler uniquement un carnet ? » interrogea Hidemi, perplexe. La caisse aurait été un butin bien plus prudent et plus lucratif.
« C’est cela père ? » sembla interroger le gérant. Cette question interpela Hidemi. Le restaurateur ne savait pas pourquoi il faisait appel à des shinobis…
« Attendez. » temporisa-t-elle. « On vous a dérobé ce carnet, oui ou non ? »
Le restaurateur se tourna vers elle.
« Je n’ai jamais vu ce carnet. J’ai appris les recettes auprès de mon père et quand j’en serais digne ou qu’il rejoindra nos dieux, j’hériterais de son carnet de recette. Pour l’instant, je pratique la cuisine de mémoire et parce que je l’ai appris à ses côtés. Ce carnet est ce que notre famille a de plus précieux.
- J’entends… Pour des restaurateurs, une recette est importante. » Hidemi fixa de nouveau le vieil homme. « Mais est-on entré par effraction chez vous, monsieur ?
- Le carnet a disparu ! Je vous le dis ! Et maintenant cette recette… »

L’aïeul semblait trop en colère pour avoir une conversation plus sereine. Hidemi fronça les sourcils et soupira, déjà légèrement agacée.
« Bon… écoutez, montrez-moi où se trouvait le carnet pour voir s’il y a des traces d’effractions. Vous permettez ? »
Le gérant acquiesça de la tête et se dirigea vers une ouverture cachée par un drap coloré. Il le souleva et dévoila un escalier qui donnait à l’étage. Hidemi se dirigea vers lui puis, elle se rappela qu’elle était venue en équipe. « Tu viens Miko ? » dit-elle, bien consciente que sa compagne dans la mission ne pourrait pas goûter plus longtemps au Donburi.

  Tout à son observation de la nourriture, Miko remarqua à peine l'entrée de sa partenaire. Quand à l'échange qu'elle avait eu avec la famille, la jeune caprin en retînt plusieurs informations; comme le laissait sous entendre son regard précédant, la petite kunoichi était loin d'être aussi intouchable et évanescente que son attitude laissait paraître; le vieillard lui semblait trop hargneux pour ne pas être victime d'injustice. De son expérience, les personnes âgées ne s'excitait pas ainsi sans une excellente raison, et la plus logique étant l'injustice.

   Avec ces pensées en tête, une lamelle de bœuf entre les baguettes, la bouche pleine de riz baignant dans le bouillon, elle s'interrompît en entendant son nom. Cette demande de Hidemi sonnait comme une petite vengeance à ses oreilles. Miko se promit de faire attention avec elle, elle ouvrit grand ses yeux, l'air étonnée et désappointée. Avalant d'une traite sa bouchée, elle lança J'arrive !" sans faire miner de bouger son popotin, à la place ses baguettes s'agitèrent dans un mouvement continu vers sa mâchoire qui mastiquait très rapidement les aliments à la manière d'un caprin dévorant herbes et arbustes. Finalement elle porta le bol à ses lèvres et dans un bruit de succion fort peu agréable, fini les trois quarts de sa portion avant que le groupe ait fini de grimper à l'étage.

 - C'était très bon ! Pas de doute que je saurai reconnaitre ce plat si jamais je le goûte de nouveau dit-elle en souriant à la serveuse, un petit rôt finissant de ponctuer sa phrase.

A présent rassasiée, elle se dépêcha de rattraper le petit groupe en grimpant les marches en bois deux par deux. Arrivée à l'étage, sur un pallier en bois, elle vit le petit groupe qui entrait dans une pièce. Se faufilant derrière eux, Miko entra dans une pièce assez vaste, comprenant un mobilier chic, dont un bureau orné de sculptures de dragon. Deux battants fermés en face d'eux permettait une aération avec l'extérieur. Le vieillard se dirigea vers son bureau en s'exclamant:

 - Là ! Voyez bien que le verrou a été forcé, je suis le seul à avoir la clé !

Miko prit les devants en suivant le papy, elle contourna le bureau pour voir la serrure. Elle présentait des rayures sur les cotés, Miko s'agenouilla pour examiner de plus près, l'intérieur était décalé. Elle se releva pour le dire à sa collègue, qui était resté avec le gérant, juste devant eux.

 - La serrure a bien été forcée. Elle se tourna vers le vieillard trépignant d'impatience - Quand l'intrusion a-elle eu lieu à votre avis ?  Vous n'avez entendu aucun bruit suspect ?
 - Pas plus que d'habitude ! s'exclama le vieux
 - Les chats font parfois du bruit, le bois aussi lui répondit le gérant avant de continuer - Nous n'allons pas souvent dans cette pièce, même père n'y va plus beaucoup depuis quelques temps

Miko les laissa discuter tandis qu'elle se dirigeait vers les deux battants. Elle en ouvrit un pour observer une petite cour doté de quelques arbustes, ils ne se trouvaient pas du coté de la rue. Derrière la cour fermée par une palissade de bambous se trouvaient d'autres bâtiments. Miko ferma les yeux, profitant de la légère brise sur son visage. Cette mission était décidément fort agréable.

La brise glissait le long de ses cheveux, agitant les plis de sa jupe. Miko continuait d'observer l'horizon en essayant de synthétiser la situation présente, tout commençait par deux restaurants en querelles depuis longtemps, un vieillard orgueilleux, un gérant en manque de reconnaissance, une effraction visible dans une pièce fermés à clé. Sans y prendre garde, les pensées de Miko suivirent l'inclination naturelle qui ne manque pas d'apparaître lorsque deux toutes jeunes femmes dissemblables se rencontrent. Elle repensa aux propos qu'Hidemi lui avait dit avant d'entrer dans le restaurant, lorsqu'elle l'avait réprimandé sur l'importance de la nourriture. Ainsi sa collègue n'était pas assez avancée dans la connaissance de soi pour déterminer les qualités et talents que ces ancêtres n'avaient pas manqué de lui léguer. Ses plus proches parents en tout cas n'était pas dénué de richesse, Miko aurait tant voulu porter des vêtements aussi soyeux. C'était avec une curiosité presque enfantine et jalouse que la jeune caprin tentait de dévoiler la fierté dissimulée derrière une éducation stricte, loin des lois simple de la nature.

 Miko revînt à la scène présente lorsque le gérant et son père montèrent d'un ton, profitant de la présence de deux jeunes femmes pour résoudre un conflit entre eux deux passés sous silence depuis quelques temps. Elle n'écouta que d'une oreille distraite ces propos, ils n'avaient pas grand chose à voir avec leur mission. Hidemi semblait du même avis, elle s'était rapprochée de sa collègue pour lui lancer un flot de questions, auxquelles Miko répondit de manière évasive:

  - Je pense que ça vaut le coup de vérifier.

Mais lorsque Hidemi tourna son regard vers elle, pour lui demander d'un ton léger si elles devaient sauter, les yeux de Miko pétillèrent de joie en croisant son regard. Ne goutant nullement l'ironie de sa partenaire, elle lui répondit - Excellente idée ! avant de se retourner vers les deux parents pour leur annoncer avec un visage grave et d'un ton sérieux:

 - Nous allons de ce pas voir si il y a d'autres traces d'effraction dans votre jardin, nous reviendrons vous communiquer nos découvertes après être allée chez votre concurrent.

 Juste avant de se tourner face à la cour, le regard de Miko fut attiré par un visage juvénile masculin et une touffe de cheveux courts qui disparaissait subrepticement derrière l'encadrement de la porte. Trop tard pour y réfléchir, Miko effectuait déjà quelques mudras afin de transformer ses pieds en sabots et ses jambes furent couvertes de poils, noir à la base et gris marron en remontant jusqu'aux cuisses. Elle sauta sans plus de cérémonie, atterrissant avec grâce et facilité sur les gravillons dans la cour. Elle annula alors sa technique pour marcher normalement, observant les alentours. Un bout de tissu attira son attention, il était accroché sur la palissade en bambou, précisément là où elle semblait pencher légèrement, comme si quelqu'un avait pris appui dessus. Elle grimpa à son tour sans trop de difficulté, la barrière n'étant pas bien haute. De l'autre coté, Miko se retrouva dans une petite rue parallèle à celle qu'elles avaient empruntés plus tôt. Elle s'adressa à sa collègue discrètement :

 -J'ai aperçu un jeune homme juste avant de partir, sûrement le petit fils qui écoutait à la porte, je sais pas bien ce que ça veut dire mais les traces qui nous ont menés ici semblent un peu trop parfaite.

 Elles se dirigèrent ensuite vers l'autre restaurant en remontant le ruelle. Revenue dans la rue de départ, ayant dépassée le premier restaurant, elles arrivèrent après quelques instants de marche face au concurrent. De prime abord, celui-ci semblait moins riche, quoique le bois de base ayant servit à la construction fut le même, il était clair que de nombreuses années avaient passées depuis la dernière rénovation. D'emblée, une vieille femme rabougri qui attendait avec sa canne devant, appela son fils en voyant les deux Kunoichi arriver, puis elle leur parla calmement :

 - Bonjour mesdemoiselles, vous venez pour l'enquête lancée par ce vieux briscard qui pense qu'on lui a encore volé son carnet ? Je suppose que vous connaissez déjà le rapport qui a eu lieu lors de la dernière altercation, quand je cuisinais encore avec mon père ! Nous avons été innocenté, mais pas sans en subir de conséquence entre temps, j'espère que vous serez plus rapide aujourd'hui ! son fils arriva alors, un tablier au cou, il était moins épais que son concurrent mais à peu prêt du même âge
 - Oui mère ?! Ah bonjour mesdemoiselles, veuillez entrer, je vous prie, nous sommes à votre entière disposition. Tenez, prenez place pour gouter le fameux plat.

 Miko les salua avec respect et s’exécuta. Elle regarda le bol posé devant elle, moins ouvragé que le précédant, d'une teinte beaucoup plus naturelle. Avec ses baguettes elle tria de nouveau les aliments, puis y gouta avec déférence avant de passer le bol vers Hidemi avec un sourire, peut être qu'elle avait faim elle aussi. Elle prit alors la parole pour livrer son observation:

 - Ce donburri est très similaire à celui que je viens de gouter chez votre concurrent, mais je ne pense pas que ce soit tout à fait le même. Vous avez changé la recette récemment ? Le gérant sembla hésiter, mais il préféra dire la vérité
 - Oui, en fait, ma fille m'a conseillé d'ajouter quelques ingrédients, c'est une véritable virtuose ! Elle tiens ça de sa grand mère.

Miko laissa sa collègue prendre la suite, songeant à la situation.

Flashback \\ Après avoir sauté la palissade en bambous, les deux kunoichis se trouvaient dans la ruelle perpendiculaire, avant de rejoindre la rue principale où se situait les deux restaurants. Miko réagit aux interrogations de Hidemi d'un ton sérieux avec une pointe de fierté:

 - Oh ça... C'est la force que m'ont léguée mes ancêtres. Ma famille est si proche de la nature et des Kamis depuis tant de génération qu’ils nous ont donné le pouvoir de nous rapprocher d'eux et de protéger l'essence sacré de la vie. C'est plus facile comme ça de savoir qui on est et ce qu'on doit faire pas vrai ? ajouta-t-elle avec un sourire Fin du Flashback // De retour dans le second restaurant.

Miko était assise en tailleur sur un coussin, elle regardait Hidemi avec gentillesse en lui tendant le bol fumant. Mais son offre fût rejetée avec un haussement de sourcils, provoquant une mine boudeuse sur son visage. Se voir refuser un si bon plat qui n'attendait rien d'autre que de finir au fond de leurs estomacs la rendit maussade. Elle reprit le bol et les baguettes dans ses mains, déterminée à en terminer tout le contenu. Étant donné le dédain de sa collègue pour la nourriture, il lui sembla tout naturelle de la laisser continuer l'enquête toute seule. Ainsi elle écouta les divers échanges, observa l'arrivée d'une jeune femme rousse de leur âge, hocha la tête, les joues pleines, à la question rhétorique de Hidemi. Elle mâchonnait une lamelle de porc pendant la tirade du gérant sur sa fille. Le bol à présent dans ses mains, buvant le bouillon, elle regarda avec étonnement sa partenaire élever la voix. Pour un corps si frêle qui ne désirait pas se renforcer, elle était bien intimidante. Miko reposa le bol vide et décida de se joindre à la discussion.

Elle arriva à coté de Hidemi, l'air sévère, son regard bleu dégageant une froideur autoritaire dirigé vers la rouquine. Celle-ci finit par leur révéler une relation obscure avec le fils qu'elle avait aperçu plus tôt dans l'autre restaurant.
Miko fronça les sourcils, quelle était la nature de cette relation ? Pourquoi ce garçon lui aurait dévoilé des secrets de famille ? Elle tourna la tête vers le gérant qui prit la parole. Son regard devint plus doux, presque compatissant, elle acquiesça à ses propos tandis qu'une conclusion simple s'imposait à son esprit. Hidemi la questionna sur la suite des événements, Miko lui répondit par un sourire complice puis elle prit la parole d'une voix grave en tournant sa tête vers Sachiko :

 - Oui, nous allons aller voir ce Eiji. Mais tu vas nous accompagner Sachiko ! De toute évidence tu es aussi à l'origine de ce conflit et d'une manière ou d'une autre, vous allez devoir vous présenter des excuses publiques.
A cette exclamation, Sachiko sursauta légèrement et sa grand mère s'avança au devant des deux kunoichis pour leur lancer : - Oh non ! Ma petite fille ne va pas là bas toute seule se faire humilier, je viens aussi !
Miko acquiesça une nouvelle fois, elle aurai préférée se retrouver seule avec Sachiko pour mieux obtenir la confession complète avant de la confronter aux autres restaurateurs. Mais l'intérêt principal était de l'éloigner de son père, visiblement trop confiant en sa fille.

Elles sortirent du restaurant toutes les quatre, plusieurs personnes les regardèrent marcher dans la rue, on pouvait distinguer trois cents mètres plus loin une petite foule devant le premier restaurant. Miko arrêta alors de marcher et se tourna vers Sachiko en lui prenant les épaules, la toisant d'une bonne tête de haut avec des yeux presque suppliant.

 - Ecoutes ! Avant d'être devant Eiji, je dois savoir pourquoi il t'as donné des ingrédients pour ta recette. La grand mère s'arrêta également, en retrait, écoutant attentivement. Sachiko une nouvelle fois surprise esquiva tout regard en le plongeant sur la rue, elle répondit néanmoins d'une petite voix discrète:
 - Il... Il voulait qu'on se marie l'année prochaine, il m'a promis que nos deux familles seraient réunis et que je serai la gérante des deux restaurants. Elle versa quelques larmes sur son visage rougis par l'émotion, tandis que son aïeul laissa s'échapper un Oh non! offensé, Sachiko enchaîna: - J'ai refusée, on ne peut pas leur faire confiance, mais il a insisté ! Il m'a donné des ingrédients secrets pour me prouver sa bonne foi... elle reçut une petite tape de sa grand mère qui lui dit: Tu as bien fait ma petite fillotte

Miko soupira et leur fit signe de les suivre, si elles avaient obtenus la raison de cet échange, cela n'arrangeait pas complètement l'affaire. Elles arrivèrent alors devant l'imposant premier restaurant, où la famille les attendaient en trépignant, et tout un public de divers générations conversaient entre eux dans un brouhaha intempestif. Le vieillard s'avança et s'exclama :

  - Toi ! Vieille harpie ! Vous êtes venues vous excuser cette fois ?! La foule réagit aussitôt en se taisant, observant la scène avec attention. Miko grimaça, elle tourna la tête vers Hidemi pour lui dire à voix basse:
  - Tu peux emmener Sachiko et Eiji dans le bureau en haut ? Je vais contenir ces gens le temps que tu les mettes d'accord, on a pas besoin qu'ils s'expliquent devant tout le monde, il vaut mieux qu'ils redescendent pour s'excuser tous les deux. Puis elle s'avança vers le vieillard en poussant doucement la grand mère en arrière qui s'approchait aussi, sa canne fermement tenu par ses mains ridées. Miko parla d'une voix claire et puissante, afin que toute la foule puisse l'entendre:
 
  - Du calme ! Cette affaire est délicate, tous ce que nous pouvons dire pour le moment, c'est que le tort appartient aux deux familles !

Des exclamations s'élevèrent de toutes part, et la foule y alla de ses commentaires, certains d'accord, d'autre prenant le parti de leur restaurants préférés. Miko vît Hidemi et Sachiko s'infiltrer dans le restaurant où Eiji attendait, tremblant. Voyant tout autour d'elle que les esprits s'échauffaient, elle exécuta une série de mudras pour transformer tout son corps sous la stupeur des gens présent. Elle tapa du sabot sur le sol dans un bruit qui calma tout le monde.
Les enfants s'enfuirent ou se blottirent contre leurs parents qui les rassuraient discrètement. Jusqu'au drôle de couple formés par les deux ancêtres, victime de la rage d'une querelle aussi vieille que leurs os, qui arrêtèrent de se lancer des piques. Miko reprit la parole calmement:

  Bien ! Laissez faire les Kunoichi de Kumo, attendons en priant s'il vous plait.

 Ses iris horizontaux balayèrent l'assemblée terrifiée, elle ferma ses yeux et rompit sa transformation. Tandis que ses poils disparaissaient, elle inspira longuement et expira doucement, dans l'attente que sa partenaire revienne.