▶ Sujet: Lumière au Cœur de la Brume

Dans la douceur feutrée des aurores, je me suis rendu au palais, guidé par une curiosité ardente néanmoins crispée. Sur le chemin du retour, les ombres de l'ombre, les agents de la générale du village de Kiri, m'accompagnaient silencieusement, leurs yeux invisibles scrutant chaque recoin, prêts à déceler le moindre danger. L'entrevue que j'y ai eue m'a laissé songeur, mais empli de réponses et de fierté, redoublant ma motivation. Dans les méandres de mes pensées tourbillonnantes, une autre énigme persistait.

Celle du sort du jeune adolescent Takahide, ignoré des hautes-instances. Mon esprit s'égarait dans les profondeurs troubles de la réflexion. Takahide, mon acolyte presque ami, celui qui s’en approchait au plus près, se portait-t-il bien depuis son plongeon dans les eaux troubles du lac toxique ? Avait-t-il rencontré à nouveau la mystérieuse Yuki, comme moi, et si oui, qu'en avait-t-il appris ? Ces questions planent au-dessus de moi telles mes hiboux, et je crains que seules des réponses ne les dissipent.

Les gardes élisaient domicile autour de ma demeure, veillant sur moi avec une vigilance renforcée depuis le meurtre perpétré sur l'émissaire du seigneur. Leurs silhouettes se dessinaient en permanence, une présence rassurante dans cette période troublée. Dans ce monde tourmenté par les intrigues et les dangers, j’avais poussé Takahide dans une position délicate. Responsable, je ne pouvais me résoudre à simplement l’abandonner au milieu du chaos. J’étais son aîné, je l’avais défendu, endossant les conséquence, il me fallait devenir son phare dans la tempête.

Suivant le fil ténu de son chakra comme je l'avais fait maintes fois auparavant, je me suis rendu aux terrains d'entraînement. Là-bas, dans le tumulte des combats et des entraînements, je l'ai enfin aperçu. Ce compagnon d'armes à la détermination inébranlable, s'entraînant avec une intensité palpable. Son visage reflétait la même détermination et ténacité que la mienne, une rigueur sans égale et une volonté farouche de surpasser ses propres limites. En le voyant, une lueur d'espoir illuminait mon cœur : enfin, quelqu'un qui me ressemblait, quelqu'un avec qui je pouvais partager le fardeau de nos destinées divergentes.

Je ressentais cette impression également avec le Seigneur Hatoshi Gensei, mais mon statut de serviteur voué à son autorité ne pouvait mettre qu’une certaine distance malgré son appréciation, me gratifiant d’une promotion de ses propres lèvres. Mais avec Takahide, contrairement au Daimyo, il y avait une connexion autre, une camaraderie qui transcendait les barrières imposées par nos positions sociales. Absorbé dans ses exercices, j’en profitais pour m’approcher de foulée leste et furtive, pour le surprendre davantage que la première fois, volontairement cette fois-ci.

– ALORS ? Je vois que tu vas bien malgré ton petit plongeon, tant mieux ! Ça avance ces nouvelles techniques ?

▶ Sujet: Re: Lumière au Cœur de la Brume

Je m’étais préparé à rapidement éviter un coup de sabre donné par la surprise, mais l’adolescent semblait plongé dans ses pensées, concentré sur son fort intérieur. Extirpé jusqu’à la surface, mon compagnon sans grand clan et sans pouvoir revenait à son énergie optimiste et inépuisable. Takahide était loin de se douter que cette petite aventure m’avait apporté son lot d’aventures, de défis, d’obstacles, de dangers et de récompenses. L’intrigue pesait encore sur moi, ainsi que ma demeure. L’un de mes avant-bras s’était d’ailleurs équipé d’un bandage pour venir étouffer la blessure causée par la Brume Sanglante, sans que je n’en sois la cible.

– Heum.. Un peu.

Une demeure surveillée car Yuki Fuuha, du moins elle présentait les ambitions et les compétences requises, avait assassiné l’émissaire feu-Seisuru envoyé par le Seigneur de l’Eau. L’attitude du cadet venait titiller un message caché, un appel au secours à peine dissimulé. De mes yeux, j’avais vu l’enquêtrice de glace et de brume évoluer au sein de Kiri. Elle avait osé s’en prendre à Takahide…

– Tu t’es fait déranger, Takahide, chez toi ?

Brusqué, mon comportement vira complètement, lançant des regards en coin de manière presque paranoïaque. Je portais un mudra à mon buste, avant de me résigner à ne pas l’effectuer. Me baser sur ma sensibilité au chakra était inutile, j’en avais eu la preuve par deux fois.

– N’en parlons pas ici.

A nouveau, mes expressions changeaient, plus calmes. S’agiter ne mènerait à rien, si ce n’est mettre l’adolescent plus en danger. Comme un rôle, j’endossais une sérénité de surface, pouvant donner confiance à mon homologue que la situation était en main. Durant mon irruption, j’avais remarqué qu’une sorte de lueure, de petit éclair bleuté s’était estompé lorsque Takahide s’était retourné vers moi. C’était une bonne prestidigitation pour détourner l’attention du genin.

– Tu t’exerces au raiton, non ? Peut-être que cette sensation est liée à ta nature de chakra de foudre. Je ne peux pas vraiment t’éclaircir à ce sujet, je ne suis pas très compatible avec le Ninjutsu…

Une pointe d’amertume venait entacher ma voix, à la fois ancrée et volatile, ayant appris à vivre avec cette tare. Une affliction à laquelle il était difficile d’y trouver un coupable autre que Mère Nature, les dragons jumeaux Izanagi et Izanami, ou bien encore les Fujiwara et les Anciens Empires. Au Pays de l’Eau, nul ne méritait d'être la cible de ce chagrin, cette injustice et colère.

– Mais il est bon de savoir qu’au moins l’un d’entre nous puisse en utiliser. Je suis content pour toi, Takahide.

Mon sourire timide lui était adressé, à moitié de façade, à demi-sincère, partagé entre un rôle et des émotions positives à son égard, plus pessimiste à mon sujet.

▶ Sujet: Re: Lumière au Cœur de la Brume

La manifestation d’éclat foudroyant autour de Takahide ne corroborait pas avec ses dires. De toute évidence, l’adolescent était en train de s’éveiller à sa seconde nature de chakra, cumulant le suiton et le raiton, une nouveauté qui pouvait expliquer ses récentes sensations de sursaut. Alors qu’un éclair aphone presque palpable se figeait, octroyant une certaine aura à l'épéiste, je reculais d’un pas. L’adolescent visiblement en colère, davantage par dépit que par conviction mal placée, laissait échapper ses émotions et son chakra sans filtre.

Surpris, je réalisais que le procédé pouvait lui être bénéfique. Vient le dilemme, celui de guider Takahide tout en l’énervant suffisamment sans me faire démasquer sur mon désir de lui venir en aide, à bien des niveaux. Après tout, désormais j'étais lié au genin, et si les hautes instances avaient fait la sourde oreille à ce propos, c’était avant tout car rien d'irréparable n’avait été commis. J’en étais navré, mais j’allais me jouer de lui et de ses valeurs qui me touchaient autant qu’elles me contrariaient, m’apitoyant plus que nécessaire sur mon sort, grossissant les traits pour venir déclencher son courroux.

– Tu en as de la chance Takahide, d’avoir deux affinité lorsque je n’en ai aucune. Toi, tu es un vrai ninja.

Le jeune ninja explorant encore son potentiel semblait savoir que j’étais rentré en contact avec Yuki Fuuha, seul à seul. Cela avait été le but des manœuvres précédentes, et je doutais qu’il soit totalement conscient de ses faits et gestes. Nuls Kirijins n'oseraient remettre en doute la Brume Sanglante. D’ailleurs, il n’en faisait rien, mais assurait placer ses amis, dont j’étais à ma surprise le seul, au-dessus de Kiri, du pays de l’eau et de la loyauté qui leur étaient dûes. Une déclaration tout aussi grave.

– Mais au moins, moi, je suis loyal à l’Eau et la Brume. Comment veux-tu devenir le prochain épéiste de la Brume de légende avec pareille mentalité ?

Un moment de doute. Je venais peut-être d’aller trop loin, attaquant au cœur le rêve de l’adolescent pour venir le briser contre le prisme de la raison. Une sensation au temps mal venu qui ne faisait que simuler et amplifier les obstacles qui se dresseraient envers le chemin de Takahide.

– Je serai à ta place, je ne gâcherai pas autant de talent !

Je détestais ce mot. J’avais été éduqué dans l’effort, pour compenser les dons des grands clans qui se devaient de s'entraîner aussi. Seulement voilà, les petites familles se devaient de suer à grande eau, de déplacer des montagnes, de brasser l’air plus que nécessaire, d’entretenir une flamme ardente à son développement, afin de devenir des bêtes d’entraînements. C’est ce que nous étions Takahide et moi. Et même s’il avait l’avantage d’avoir un chakra plus dense que le mien, réduire tous ces sacrifices à un “talent” revenait à un blasphème. La goutte d’eau qui faisait déborder le vase.

Mes molaires s’écrasaient sous ma mâchoire qui s’activait, pour contenir ma frustration. Celle envers moi-même. Je détestais avoir à adopter ce comportement, las des hostilités inutiles, de cette couche de complexité bradant la frugalité, la simplicité et la naïveté de Takahide que j’appréciais tant. Le jeu en valait la chandelle.

Irrite-toi, Takahide. Courrouce-toi. Fais-moi me fourvoyer. Haïs-moi.

Mais éveilles-toi.

Spoiler:

▶ Sujet: Re: Lumière au Cœur de la Brume

Les éclairs glissaient et s’écoulaient sur la peau du genin, sans interruption, sans décharge, sans flash ou vibration. Une intuition: le calme, avant la tempête. Mais l’orage se refusait de vrombir. L’esprit éclaircit, d’une lueur de lucidité, Takahide semblait avoir conscience que Mizu no Kuni n’était pas parfait, faisant au mieux dans son contexte et restrictions si particulières, dictées par le monde extérieur. Enclenchant des mudra, presque aussi maladroit que les miens plutôt limités, toutefois parfois nécessaire à mes invocations ou mes dons de senseur, l'épéiste préparait quelque chose, se réinventant dans une recherche instinctive.

Je m’y étais préparé, mes sens à l’affût, mes muscles et mes nerfs sur le qui-vivent. Le coup de Takahide était téléphoné, dans le moindre détail, dans chaque séquençage de ses micro-mouvements, depuis l’âme de son regard jusqu’à la profondeur de sa déclaration précédente. Pointant le ciel, je restais béas, presque idiot, quand le raiton s’elevait dans les airs. Le buste et la nuque exposée au ciel, admirant l’oiseau des tempêtes prendre son envol. Mes yeux s’écarquillaient légèrement. Il ne s’agissait pas de raiton. Habitué à m’entrainer pour esquiver le Ninjutsu, je savais au moins reconnaître la nature des chakra les plus communes.

Mes lèvres s’entrouvaient, de surprises. Takahide venait tout bonnement d’éveiller un pouvoir. Mieux, il savait déjà en user une partie. J’en devenais jaloux face à autant de facilité. Nous n’étions d’or et déjà plus dans le même monde, dans la même cours. Pour autant, le genin préservait un passé commun avec le mien : il pouvait comprendre ce que j’endurais, ce que cela impliquait. Mes pupilles se dilataient dans un second temps, face à l’ultime détail. La foudre dessinait des ailes et un bec caractéristique qui m’était plus que familière, à l’effigie de mes compagnons ailés, résonnant d’autant plus que le pacte qui m’y reliait, séjournant sur les archipels de la Lune au plus près du pays des tempêtes, donnant ainsi son nom : Le clan du Hibou des Tempêtes.

Takahide était bien plus observateur qu’il ne laissait paraître et d’une attention remarquable.

Quand la Lumière au cœur de la Brume se dissipait, j’accordais une oeillade à mon.. Ami. Mes yeux envieux et attendris, commençaient à fuir le sien, plongeant une main dans mes cheveux, la paume remontant le long de ma nuque.

– C’était pas.. Enfin.. Je ne pensais pas tout ce que j’ai dit.

En partie, et probablement pas à des degrés aussi tranchés. Je supportais la réalité avec bien plus de résilience qu’il n’en fallait, sachant m’adapter et activer les leviers auxquels j’avais encore un tant soit peu de contrôle et d’évolution. Ce qui m’était certain, c’est que son rêve allait s’y confronter, et qu'à son tour il devait faire face à une adversité redoutable, à la hauteur de ses aspirations audacieuses.

– Mais ce n’était pas du raiton. Quoi qu’il en soit.. Prends quelques instants afin de mémoriser la sensation qui t’as parcourue, cela pourrait t’aider à l’avenir pour la réutiliser.

J’inspirais devant mon interlocuteur, relâchant lentement un soupir, indécis mais libérateur.

– Prends tes affaires. Tu voulais savoir pourquoi tu me trouvais.. tourmenté, non ? Je veux bien t’en parler un peu, en privé. J’ai aussi des questions. Et tout cela ne se discute pas sur un terrain d’entraînement.

Le petit domaine du dojo des membres du clan Fuwa évoque un mélange subtil de tradition et de pragmatisme. Niché à fleur du quartier du clan Yuki, entouré par des arbres verdoyants et des ruelles plus coupe-gorge, le dojo semble presque fusionner avec l'environnement qu’ii l'entoure. Les bâtiments sont modestes mais solides, construits avec des matériaux locaux et forgés avec une attention méticuleuse, apte à traverser le temps comme le prouve déjà une teinte propre mais usée. L'architecture témoigne d’un sens du détail qui se retrouve jusqu’à l’agencement ou les objets de qualités, sans superflu. Chaque poutre et chaque pierre respirent ironiquement d’une certaine noblesse brute et rustre. À l'intérieur du dojo, une atmosphère empreinte de respect et de discipline règne en maître. Les murs sont ornés de parchemins anciens, témoignant des enseignements transmis de génération en génération.

– Allons chez moi.

J’instaurais un temps de pause avant de prendre la route, jusqu’à mon foyer. Celui-ci était entouré de garde. Il y avait de quoi refuser d’entrer. Mais si Takahide acceptait d’y pénétrer, il pouvait y voir que ma première action était de convoquer l’un de mes hiboux, lui demandant de guetter les environs, fixant un marquage au sol à la forme humanoïde, d’une moue perplexe.

▶ Sujet: Re: Lumière au Cœur de la Brume

Mon regard se perdait sur le petit pavé, en direction d’une porte coulissante un peu plus loin. Le hibou s’ancrait sur le toit de la demeure, qui de l’extérieur semblait spacieuse, mais qui en réalité abritait un imposant terrain vague au centre de ses murs. L’oiseau se fondait dans le décors, en tout point pareil qu'à son espèce animale auquel il ne présentait aucune disparité ou anomalie. Je marchais plusieurs mètres jusqu’à ces marquages humanoïdes, avant de m’y arrêter brièvement, joignant mes mains un court instant, d’une attention fugace, répétitive, brisant le rituel pour venir me déchausser sur le bois qui précédait le plancher.

J’ouvrais la porte de ma chambre, désaxée de l’entrée principale, mais qui donnait à son tour une vue sur le centre du domaine, parsemé de végétation et d’installation, de modules servant à la pratique. Je m’y engoufrais, scellant la porte après le passage de mon invité, qui ne se comptait que d’une main incomplète. Il y avait une certaine lourdeur, plus qu’à l’accoutumé. Il me restait des kaki séchés, grignotés pour lutter contre la nuit il y a quelques heures. Je les lui présentait en m’installant à la table, espérant ne pas trop l’étouffer, d’une considération à l’égard de son dégoût pour le riz.

– C’était le corps d’une personne respectable. Cela aurait pu être moi. Je me tenais à cette même place, quand il a été assassiné. La Brume a chassé l’intru. Je pense que l’identité du meurtrier est Yuki Fuuha.

J’avalais un glaire.

– Le dernier enseignement du Code Assassin de Kiri. Récite-le avec moi : La Brume est l'alliée de Kiri, nul ne doit la remettre en question.
…
Il est à la fois plus véridique et plus énigmatique que je ne le pensais.. Aies confiance en celui-ci.

Mon plus grand allié, sauveur et bourreau avait toujours été représenté par le Seigneur de l’Eau. De part cette allégeance, cette loyauté et confiance avait fini par venir partiellement éclipser celle de la Brume. Intimement, les deux m’apparaissaient liés, sans preuve tangible. Les derniers événements m’avaient fournis tous les éléments pour le confirmer, faisant mûrir davantage ma vision du Pays de L’Eau.

– Il y a eu une affaire, celle des “Trois étoiles montantes”. Un membre du clan Kaguya, Yuki et Sabreurs, tous trois accusés de traîtrise pourtant réputés fiables, rongés par la Brume.
Il n’en était rien, ce n’était qu’une scène déguisée, ainsi que l’implication de deux personnes inconnues : un Yamanaka, et une personne maniant une foudre qui n’a rien d’un raiton.
Ton pouvoir Takahide.. Tu étais comme moi, tu n’en possédais aucun. Que s’est-il passé ? Tu penses avoir un lien avec cet individu ? N’importe lequel..

Je n’avais pas prévu cette partie. L'épéiste était peut-être la solution pour traquer l’un des deux criminels inconnus. Qui plus est, l’exploitation de son don sans en prévenir les autorités pouvaient le mener à quelques complications que je souhaitais lui éviter s’il n’était en rien impliqué. Je ne pouvais pas tout expliquer à Takahide, mais je lui devais quelques éclaircissements quant à notre rencontre, et l'état d’esprit dans lequel j’avais saisie l’opportunité de notre petite exploration brumeuse.

– La Brume n’a jamais dévoré les trois étoiles montantes. Mais le doute s’est installé, ils ont retourné contre Kiri, temporairement, la confiance accordée à la Brume. Et si, il y avait eu des tentatives en imitant la Brume n’ayant jamais été découvertes ? C’est cette question qui m’a mené vers le lac, à tes côtés, avec Yuki Fuuha.

Dans le processus, je présentais ma rencontre avec l’enquêtrice des glaces de cette manière. Elle était celle qui possédait le plus de savoir à propos de la Brume, et il ne faisait aucun doute que les autorités s'intéressaient à l’état de ces connaissances. Je taisais certaines informations, Takahide n’avait pas l’ensemble de l’histoire, parfois même la chronologie était imprécise.

– Je l’ai revu. Elle m’a utilisé. Moi aussi, mais définitivement moins qu’elle. Alors je vais te poser la question. Que penses-tu d’elle ? Tu sembles savoir que je l’ai revu. Et elle semble t’avoir rendu visite chez toi, comme chez moi. De quoi avez-vous parlé.. Et comment elle t'utilises ? Te menace-t-elle ?

Mes yeux s’attardaient dans les siens, me penchant plus en avant, baissant légèrement le son de ma voix.

– Ces murs sont sous protection accrue depuis l’incident. Tu peux délier ta langue, Takahide.

▶ Sujet: Re: Lumière au Cœur de la Brume

– Pas même un cousin éloigné, une branche inconn-..

“Etre ignorant de son ignorance est la maladie de l'ignorant.” “ Tout le monde est ignorant, sur des sujets différents.” Cette fois-ci, le cas de Takahide les mettrait tous d’accord, tant le phénomène caché était encore inconnu. Et celui en cours de Bankichi ne mettrait que davantage le sujet sous le feu des projecteurs.

– C’est le principe.. Dommage, c’était une bonne piste. Parfois, des pouvoirs tardent à se manifester, même parmi les clans puissants comme les Kaguya et les Yuki.

Ces derniers se retrouvaient sur l’île de la seconde chance, comme Yuki Shinki qui peinait avec la glace. L’éveil au chakra avait encore quelques unes de ses règles à dévoiler. Pourquoi certaines lignées comme la mienne et celle de Takahide n’y était jamais complètement parvenue ? Pourquoi le Daimyo, dont la mère commandait à la Brume n’obtint jamais cette même capacité, usant d’un stratagème non identifié pour en acquérir le contrôle. Les inconnues échappaient à ce qui était devenu la normes et les généralités.

– Hmm, tu permets ?

Je fermais les paupières, exécutant un mudra. Aussitôt, ce petit mécanisme m’aidait à ressentir au travers d’une perception autre. Je me concentrais sur le genin en face de moi, jusqu’à ne voir que lui. Ou plutôt, son chakra, le décortiquant, le sondant en le comparant à la sensation imprimée de son lui passé, dans ma mémoire jusqu’au bout de mes doigts. Je rompais après quelques secondes le signe incantatoire, posant à nouveau le regard sur Takahide.

– Ton chakra est reconnaissable, bien qu’une légère altération s’y trouve, il est changé mais c’est liées et liables.. Hm, des sursauts tu disais,..
Etant donné que c’est frais, il faudrait tenir les autorités au courant. La révélation aurait pu attirer mobilisations et regards, mais ils s’en tiendront au jugement de la Brume, il n’y a pas à s’en faire.

Mon ton était calme, analytique et procédural, tourné vers le cheminement escompté. Il y aurait probablement des Kirijins pour l’associer au recherché, autant que les instances lui disposent de toutes justifications ; elles en avaient le pouvoir.

– Ne l’utilises pas à tout va avant que ce ne soit fait.

L’un de mes coins de lèvre se levait, entamant un sourire retenu, mes yeux se plissaient légèrement, avant qu’un soupir se fasse entendre. La raison était simple, je l’en sentais capable. A sa place, ça aurait été la première chose que j'aurais faite, de sentir circuler un tel pouvoir dans mes veines, de le développer. La tentation était forte. Ce contre-temps opportun réglé, mais pas de la moindre importance, il était temps de recentrer la discussion sur Yuki Fuuha. L'épéiste semblait avoir une bonne opinion – trop bonne – de l’enquêtrice des glaces, à l’instar de mon propre avis avant d’en apprendre plus à son sujet. Néanmoins, cela lui avait permis de retracer sa planque, ou plutôt l’une d’elles en se basant sur l’intelligence de la Yuki.

– Je ne pense pas qu’elle soit une bonne personne non plus. Tout n’est pas tout blanc ni tout noir. Yuki Fuuha est un gris, un gris foncé et trouble.. très trouble.

Ancienne Jônin qui a fauté après avoir été trop loin, attaquée deux fois par la brume et ce simplement durant les instants passés avec elle. a fait des pots-de-vin à différents gardes et a tué l’émissaire seigneurial. La liste était probablement incomplète après toutes ces années d’indépendance. Pourtant, malgré tous ces faits, nulle prime ne planait au-dessus de sa tête, comme si on la laissait faire. En réalité, la brume se retenait, pour la mettre en confiance, pour exposer davantage des situations futures.

– De l’autre, elle ne m’a pas paru hostile, ou mauvaise, même si j’en avais peur. Mais, ça ne concorde pas avec ses actions, qui eux le sont. Action que je pourrai te décrire, mais dont j’ignore la motivation..

De belles verbes, une belle apparence et bel esprit dans un comportement immonde, c’était la désagréable sensation qu’elle m’avait laissé. Ce qu’il me manquait, c’était son motif. Un motif, dont j’avais été à deux doigts d’apprendre, avant que la Brume et la Mizukage n'interviennent. Après une rapide réalisation, comme tombé du ciel d’un éclair frappant, je percutais qu’il y avait toujours des vérités qui ne devaient pas fuiter.

– Je pense qu’apprendre auprès d’elle te vaudra des problèmes, je ne te le conseille pas. Encore moins si ça m’en cause.
Il y a certaines choses dont tu peux me parler. Peut-être qu’en rassemblant nos informations, on pourra mieux saisir qui elle est réellement.

▶ Sujet: Re: Lumière au Cœur de la Brume

– Une arme pendant les missions, en dehors c’est autre chose. Commence par surpasser les Sabreurs, contrairement à la Brume, ils ne sont pas aussi forts qu’une nation entière. Même ça sera long et difficile, et si tu parviens le miracle de surpasser la Brume, alors j’ai hâte, ça n’en sera que bénéfique pour le pays.

Si je me considérais comme un outil pour les hautes-instances, il n’en restait pas moins que j’avais des sensations et des sentiments, que je parvenais avec peu de brio à prospérer. Je savais les contrôler, les faire taire, même les faire vivre, mais je cherchais encore ce chemin qui n’appartenait qu’à moi, en plus de celui qui m’était promis et dont je me dévouais. Takahide lui, l’avait trouvé, quelque chose dont sa volonté personnelle désirait. Son objectif était clair, se tenir au sommet des Sabreurs et de la Brume, un rêve de grandeur et de puissance, d’espoir et d’amour. Je n’avais pas ce rêve, je n’en avais aucun, aucun que je ne connaissais encore. Il me semblait pourtant important de rappeler au genin que cela nécessitait un certain conditionnement.

– Quant à la torture.. Personne n’y résiste, tu le savais, tout n’est qu’une question de temps. L’important, c’est d’en gagner le plus possible pour l’équipe de sauvetage, bien que souvent elle soit constituée à la hâte.

L’anecdote qui semblait sortir d’un cours académique réflétait mon sérieux à toutes épreuves, mais un ton amusé presque fier venait faire chanter ma voix. Une mention pédagogique, une boutade amicale, il n’y avait pas plus de portée que cela.

– De toute façon, si je suis dans l’ignorance, d’autres ne le sont pas. Cette histoire ne date pas d’hier.

Les hautes-instances en connaissant le motif, sans quoi Yuki Fuuha n’aurait jamais eu à faire faire à ses responsabilités. En parlant d’histoire…

– En tant que non-détenteur de chakra aux capacités uniques, je connais la symbolique que représente de se désolidariser d’un grand clan comme les Yuki. Moi aussi, je trouvais cette histoire inspirante, jusqu’à récemment, puis j’ai appris la vérité..
Heureusement, il me reste une figure emblématique en laquelle je peux m’identifier, un peu..

L’air songeur, un petit sourire s'esquissa sur mes lèvres, plus douces, avant de se crisper quelque peu. Hatoshi Gensei était un modèle pour les Fuwa, un homme sans puissant chakra, comptant parmi les meilleurs assassins de son époque, devenu le plus influent du pays sur plusieurs décennies. Le crispement précédent s’amplifiait, le faciès grave je dévoilais à Takahide ce que je savais à propos de l’enquêtrice. J’avais souhaité qu’il se fasse une opinion de lui-même, mais il ne le pouvait guère sans détenir plus d’informations, bien que désormais, il était en droit d’avoir le jugement le plus complet de nous deux.

– Yuki Fuuha est une ancienne Jônin. Ce titre lui a été retiré, comme une punition, après qu’elle ait franchi certaines limites, que j’ignore. Néanmoins, elle a versé plusieurs pots-de-vins la rendant coupable de corruption. A cela s’ajoute le meurtre d’un émissaire seigneurial, un acte de trahison envers le pays de l’Eau, ni plus ni moins. A ma connaissance, elle a récemment été attaquée par deux fois par la Brume Sanglante, probablement plus depuis sa destitution au sein de la hiérarchie de Kiri. Voila ses actes, voilà qui elle peut être. Cette liste n’est que ce que j’ai pu recueillir, par manque de temps, nul doute qu’elle est en réalité bien plus fournie, elle a plusieurs années d’activité après tout.

Ce n’était pas tout. Un dernier élément, une supposition née des paroles les plus fiables : « Si la Brume appliquait sa sentence dès aujourd'hui, elle se priverait d'occasions d'en appliquer de nombreuses autres plus tard – ou d'en découvrir. » Il ne faisait nul doute que Yuki Fuuha était impliquée dans une machinerie de Kiri, avec ou contre son consentement, avec ou contre son insu. Elle était un appât, un vers que l’on agitait, pour que les poissons mordent à l’hameçon. Une fois les poissons devenu banc, leurs destins étaient tout trouvés..

– Cela aurait été quelqu’un d’autre que toi, je ne prendrai pas la peine de te mettre en garde. Tu devrais écouter ceux qui te veulent du bien. Et je suis sûr que Fuuha n’en fait pas partie.

Fuuha pouvait le penser, mais ses actes prouvaient le contraire.

– Si jamais tu tombes entre ses mains, elle te mettra assurément en danger, et je crains de ne pas être en mesure de te porter secours. Je ne veux pas que cela arrive. Cela me terrifie, d’autant plus que si tu l’as rencontré, c’est à cause de moi. Il en va de ma responsabilité. Ne te lies pas à elle. Ne te fies pas à elle.

Mes pupilles ne pouvait s’empêcher de s’accrocher à celles de Takahide, suspendues, agrippées à sa réponse. Au sein du dojo Fuwa, de tout temps solennel, l’instant ne dérogeait pas à la règle. L’instant fatidique sonnait.