Voilà bien deux heures que je suis sur les traces du traître Karasu, à forcer l’allure pour espérer lui tomber dessus avant qu’il ne parvienne à quitter la frontière du pays. Je suis prêt à le poursuivre à l’autre bout du Yuusei s’il m’y oblige, mais j’aurais aimé terminer cette histoire au plus vite afin de pouvoir retourner auprès de Gen’Ichiro. Parce que pendant que je suis à la poursuite du traître, le samouraï, lui, se retrouve désormais seul pour réaliser une mission extrêmement dangereuse. Je ne peux pas me permettre de trop traîner, je n’ai pourtant pas laissé tant d’avance que ça au Hyuga dépourvu de Byakugans, mais il faut croire que ce vil personnage sait comment échapper à ses poursuivants.
Lui qui s’était élancé à la poursuite du cheval de feu, quand il s’est rendu compte que j’étais sur ses traces, il a totalement délaissé le yokai équestre pour me fuir, regagnant du terrain. Depuis, c’est une lutte acharnée qui s’est engagée à distance, un duel dans lequel l’un tente de réduire cet écart que l’autre met tout en œuvre pour accroître. Karasu a beau être rapide et malin, il ne peut m’échapper éternellement. Mes yeux sont capables de le suivre à la trace, il n’a nulle part où se cacher efficacement, nul endroit où se soustraire à la lame du kunai qui promet de lui ouvrir la gorge.

Car c’est bien ce qui attend cet être ignoble qui se prétend noble, qui se prétend du même clan que le mien. La vérité c’est que j’ai toujours émis des doutes à son sujet, depuis notre première rencontre au domaine Fujiwara jusqu’à aujourd’hui encore, pendant que nous inspections le village de Ranshi Onna. Il ne m’a jamais paru complètement honnête, toujours à dissimuler de sombres intentions derrière des manières et des faux sourires, sans cesse à vouloir grignoter dans le cerveau des autres. Je m’étais promis de le garder à l'œil en sachant qu’il prendrait part au même projet que celui auquel j’ai adhéré, je savais qu’il pourrait représenter un danger par la suite. Je n’avais pour autant pas imaginé qu’il nous trahirait ainsi, dans de telles circonstances, d’une manière si peu honorable…
Cet affront commis à la face de mon ami Gen’Ichiro, ce crachat sur l’honneur du clan Fujiwara et du clan Hyuga, Karasu devra la payer de sa propre vie. Son sang lavera le déshonneur jeté sur notre nom, sa tête sera ramenée auprès de l’offensé. Il ne m’échappera pas, faut-il que je donne ma vie pour y parvenir, mais cet homme dépourvu d’honneur ne goûtera pas davantage à la chaleur d’un lever de soleil ni à la douceur d’une nuit étoilée.

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Un premier kunai perce l’air, fusant à vive allure sur sa cible, qui la repousse agilement.
Un deuxième kunai, rapidement suivi d’un troisième percent à leur tour l’air ambiant, avalant la distance jusqu’au déserteur Homurajin. Si les deux sont bloqués également, une déflagration survient depuis le dernier, emportant sa proie dans un nuage de fumée et de poussière.
— Ta fuite est terminée, Karasu ! Rends-toi ici et maintenant et peut-être que je me montrerai indulgent envers toi. Epargne-toi une mort certaine, traître ! Les mots sont prononcés tandis que je m’avance vers l’ancien soldat de la nation du Feu, ayant auparavant bondit de ma branche depuis laquelle je venais de lui jeter ce trinôme de kunais. Je sais pertinemment que la déflagration ne l’a pas envoyé dans le royaume des morts, au mieux aura-t-elle suffit à le neutraliser, mais pas l’éliminer.
Le voile créé par l’explosion du parchemin explosif s’évapore lentement, à l’intérieur, le ricanement de l’infidèle se fait entendre. — Crois-tu qu’il suffit de quelques menaces et un parchemin explosif pour me plier à tes exigences, cher cousin ? Allons… La silhouette de Karasu se dessine au sein de ce qu’il reste du nuage de fumée, il en sort de quelques pas vers l’avant, le faciès déformé par la malice et l’arrogance. — Ne te fais pas plus naïf que tu l’es déjà.

Ses yeux de serpent se posent sur moi, m’arrachant un frisson, je peux très clairement constater qu’il ne cherche même plus à faire semblant. Je me surprends moi-même à me questionner sur le comportement qu’il pouvait avoir avec moi. Pourquoi a-t-il fait semblant de me traiter avec respect et d’une certaine manière, sur un même pied d’égalité alors qu’il est très clair à la façon dont il me regarde, qu’il me méprise au plus haut point ? — Je peux comprendre… Je peux essayer du moins, même si je ne comprends pas exactement ce qui lui arrive. — Je peux comprendre que les ténèbres soient si attractives… Après ce que nous avons fait à Ranshi Onna, je me suis interrogé sur l’utilité de notre armée, de nous autres shinobis… Nous agissons pour le bien de la cité, du pays tout entier, risquons nos vies à chaque mission sur laquelle nous sommes envoyés, mais j’ai l’impression que nous sommes aveugles… J’en serre les poings, mes mâchoires se referment. Est-ce que c’est de la honte ou de la colère que je ressens ? — Plutôt, nos dirigeants le sont. Ne voient-ils pas l’obscurité qui ronge leur propre pays ? Sont-ils incapables de se rendre compte du mal qui sévit au sein même de nos frontières ? Ma tête tombe vers l’avant, soudainement trop lourde, épuisée. Haine ou honte, je crois que c’est un mélange des deux… — Mais ça ne veut pas dire pour autant qu’il faut succomber à la facilité ! Emprunter cette voie nous semble certainement plus aisée pour parvenir à faire de notre nation un pays prospère et en paix, un pays où la sécurité n’est pas qu’illusoire, mais nous détourner du bien par souci de facilité n’est pas la solution ! Je marque une pause, le cœur lourd, l’hésitation se lit désormais dans mes yeux, moi qui, il y a encore quelques minutes était déterminé à abattre cet homme. — Alors je t’en conjure, Karasu… rends-toi.

Un silence. Il semble confus, perturbé par ces mots.
L’espace d’un instant, l’espoir brûle en moi, alimenté par ce feu sacré qui anime mes convictions depuis ma naissance. Mais le rire moqueur et condescendant de Karasu balaie la flamme d’une violente bourrasque, gelant tout espoir de lui faire entendre raison. Les paroles qui s'échappent ensuite de sa bouche vont enterrer définitivement le dialogue. — Que tu es pathétique, mon pauvre ! Non mais tu t’entends ? Est-ce que tu as fini de pleurnicher sur la cruauté de ce monde ? Ouvre les yeux ! De nous deux, toi seul possède ce précieux dojutsu, mais tu es le seul à ne rien voir ! Le ton est mordant, chacune de ses paroles distillant sa dose de venin. — Ce monde est laid, Tatsuya ! HORRIBLEMENT LAID ! Indigne de ma personne, indigne que je perde mon temps à tenter de le réparer ! Je cherche seulement à m’élever au rang qui est réellement le mien, celui de divinité ! Si j’ai accepté de me joindre à vous dans cette mission, c’était uniquement dans le but d’approcher à nouveau un yokai, d’en capturer un, de pouvoir comprendre quel lien les unit aux kamis ! Tu comprends, mon cher cousin ? Tout ce que je veux, c’est défier les kamis et prendre leur place. Les traits de son visage se déforme sous une expression de dégoût. — Alors sois gentil, Tatsuya, fiche-moi la paix avec tes petits états d’âme.

Il est trop tard. Je le savais pourtant, au fond de moi, qu’il n’était plus possible de le ramener à la cité de son plein gré. Je ne peux pas dire que je ne le reconnais pas, ce serait se voiler la face, mais il me semble avoir pris un tournant encore plus sombre que le chemin qu’il arpentait jusqu’alors. Comme si quelque chose avait exacerbé ces mauvais côtés, ces idéaux un peu trop extrêmes à mes yeux. Serait-ce la mission pour ouvrir un chemin sûr de Hi no Kuni à Kaminari ? Je ne sais pas… mais il me paraissait plus censé lors de la première réunion des Descendants du Soleil, il me paraissait plus apaisé lors de notre mission aux côtés d’Eimei-sama, jusqu’à aujourd’hui encore je ne l’imaginais pas trahir Homura…
Alors pourquoi maintenant ? Lui qui semblait faire preuve de tant de patriotisme et de dévotion envers la nation du Feu, pourquoi maintenant ? En regardant dans ses yeux, la flamme de la volonté ne me semblait pas brûler en lui, tout ce que je pouvais désormais observer n’était que noirceur et intentions meurtrières. Et en posant ses yeux dépourvus de dojutsu dans les miens, immaculés, porteur des Byakugans, il comprit qu’il était désormais inutile de continuer la discussion. Le dialogue était terminé, impossible de s’entendre, impossible de se comprendre. Et quand la diplomatie échoue, pour nous autres membres du clan Hyuga, il nous reste à faire parler nos mains.

J’adopte une posture offensive, mains tendues, doigts collés. Dextre en avant, paume tournée vers Karasu, la senestre plus proche de mon torse, paume dans ma direction. Faciès fermé, ma concentration est pleinement dirigée dans ce duel qui va s’amorcer d’un instant à l’autre. En réponse à ma posture, le corbeau déserteur en fait de même, prenant une pose plus caractéristique de son style de combat différent du Juken, mais s’appuyant sur ses bases. Il m’a déjà parlé de son style, plus percutant, plus violent que le Juken, destiné à briser l’ennemi plutôt que neutraliser ses mouvements comme le veut l’élégance et la souplesse de notre noble art clanique.
— Tu penses pouvoir rivaliser avec mon Hakke ? Soyons sérieux deux minutes, Tatsuya, c’est un combat duquel tu ne reviendras jamais. Du mépris et de la provocation, encore et toujours. Il ne sait que cracher son venin, humilier les autres et les écraser par sa prétendue supériorité divine. J’en serre les dents, fronce les sourcils. C’est de la colère que je sens monter en moi. Je ne sais pas comment ni pourquoi, mais il a cet effet indésirable, incontrôlable, sur moi. C’est tout son être qui met en alerte le mien, toute sa personne qui me répugne, attise le feu ardent qui brûle en moi. Il fait naître cette colère qui lentement me ronge, gagne en terrain, gangrène mes pensées, obscurcit mon jugement et brûle mon sang-froid, une colère tentatrice aux charmes si puissants que j’ai envie de m’y abandonner. Résister est si dur en cet instant…

Et ce sourire moqueur…
— Qu’attends-tu, Tatsuya ? D’un bond rageur, je m’élance sur Karasu, déterminé à l’éliminer, lui faire passer l’envie de sourire. La paume de ma dextre fauche l’air en direction de son corps, qu’il esquive habilement avant de bondir acrobatiquement en arrière pour éviter ma sénestre. Ne souhaitant pas le laisser respirer, j’avale une fois de plus la distance qui nous sépare, enchaînant trois autres frappes visant les tenketsus. Il esquive le tout, souriant de facilité, cherchant à m’imposer sa supériorité. Étouffant un grognement au creux de ma gorge, j’abaisse ma silhouette, feintant de vouloir lui frapper la rotule de ma paume, mais c’est mon pied qui part en direction de son buste pour le repousser en arrière d’un coup puissant qui le prend de vitesse.
Il n’apprécie pas avoir été touché. Une main sur le point d’impact, son sourire moqueur se transforme en expression massacrante. Maintenant il va me prendre au sérieux, maintenant il est habité de la même envie que moi de l’écraser. Et cela se ressent immédiatement, il prend les devants dans une contre-attaque rapide et puissante, expulsant de ses poings du chakra compressé. Je dois m’employer à les éviter via un couple d’esquive, exécutant des sauts vrillés sur le côté. J’ai tout juste touché le sol qu’il me tombe déjà dessus, frappant mon flanc gauche d’un coup de poing puissant, écrasant ma défense érigée en pur réflexe, mon avant-bras élevé tel un bouclier.

La puissance de la frappe me repousse, m’amène à terre, la douleur irradie dans tout mon bras. Sans prendre la peine de pleurer le mal qui assaille mon membre, je me redresse au plus vite, sachant qu’il sera là pour tenter de m’achever au sol. Je me redresse à peine qu’il apparaît sur ma droite, genoux fléchis, frappant brutalement des deux poings pour tenter de faire imploser ma cage thoracique. Je contre d’un mouvement descendant de mes paumes de mains, celles-ci venant claquer sur le haut des poings de mon adversaire avant qu’ils ne puissent m’atteindre, les repoussant vers le bas.
Il m’offre-là une ouverture dans laquelle je vais me faire un plaisir de m’engouffrer. Juken - Hakke Sanjuni Sho. En l’espace de cinq courtes séries, je frappe à de nombreuses reprises ses points vitaux, chacune des séries comportant plus de frappes que la précédente. Les dégâts internes provoqués devraient lui rappeler ses méthodes, devraient lui offrir un aperçu de sa propre médecine. L'enchaînement fini, il titube, crachotant du sang. Je me surprends à éprouver du plaisir à ressentir sa douleur, mais plus encore, cela ne fait qu'alimenter encore un peu plus la colère que j’éprouve à son égard. A aucun moment depuis que ce combat a commencé, je me suis imaginé le ramener vivant à Homura.

Sans un mot, mais le regard noir, je m’élance pour l’achever.
Est-ce le frisson de la mort le chatouillant qui lui permet de réagir à temps ou une incroyable résilience ? Toujours est-il qu’il dévie ma première frappe au dernier moment, annulant la suite de ma technique et s’ouvrant à son tour un bel angle d’attaque. Son poing s’enfonce dans mon bide, me pliant en deux sous la violence de l'impact, avant qu’il ne m’envoie au tapis d’un crochet du gauche dont le choc résonnera probablement encore dans mon crâne dans les mois qui suivront.

Un son strident me perce le crâne, je sens quelque chose de liquide emplir ma bouche, couler entre mes lèvres. Les gouttes carmines qui tombent sur le sol, proche de ma tête, m’indiquent qu’il s’agit de mon propre sang. L’image basculante, je tente dans un premier temps de me relever, de ne pas donner mon dos à l’adversaire. — Tu sais, cher cousin, je connais le Juken, j’ai longtemps pratiqué mon propre style de combat en opposition au vôtre. Penser pouvoir me vaincre au corps-à-corps est vraiment ridicule de ta part. Il est proche, trop pour que je puisse me relever. Ma dextre s’empare d’un kunai dans mon étui tandis que de mon bras gauche, je rampe un peu pour tenter de préserver une certaine distance. Le kunai est envoyé à la tête de Karasu, qui le bloque de sa propre arme. Je m’empara immédiatement d’un second, continuant de ramper. — Pathétique… mais c’est ici qu’est ta place, Tatsuya, à mes pieds à implorer mon pardon.
Je lance le second kunai, qu’il pare également, l’arme retombant au sol quelques mètres plus loin. Un troisième déjà en main, je progresse encore d’un bon mètre au sol, avant de répéter l’opération, lui envoyant le kunai au visage. Qu’il contre lui aussi, le regard dédaigneux braqué sur moi. Sauf que cette fois, un parchemin explosif était enroulé autour de la poignée du kunai…

Karasu ne comprend le piège que trop tard, bondissant sur le côté pour s’éloigner de la déflagration qui lui souffle au visage, l’engloutissant partiellement avant que le souffle ne le repousse au loin, l’envoyant s’écraser contre un arbre. La chaleur de l’explosion s’estompe peu à peu tandis que je me relève, ayant repris mes esprits. Plus d'ultrasons gênant, la tête encore douloureuse, mais la stabilité retrouvée.
Je ne perdrais pas ce combat. Je ne perdrais pas mon honneur, ni ma vie. Pas face à un tel gâchis, pas face à ce traître dont l’âme corrompue par le vice me révulse si fort que j’en éprouve de la rage. Je dois l’abattre, il le faut. L’éliminer ici avant qu’il ne devienne plus puissant et qu’il représente une véritable menace pour le pays à l’avenir. L’éliminer ici et rapporter sa tête à Gen’Ichiro, qui s’est vu offenser tout autant que je l’ai été, que nos clans l’ont été. La trahison est un acte impardonnable pour un guerrier au sens de l’honneur exacerbé. Karasu mourra ici, j’en ai fait le serment.
Mais pour le moment, le corbeau se relève. Son plumage porte les brûlures de la déflagration de la note explosive, sa chair endoloris par les flammes, son regard exprime la colère qu’il éprouve d’avoir été pris par une tactique aussi basique pour un shinobi. Conditionner son adversaire avec un mouvement d’attaque répétitif, pour mieux le surprendre en disséminant un élément surprise dans cette dite attaque. Avec l’arrogance et la confiance en lui dont il a toujours fait preuve, il y avait de bonnes chances que cela prenne. Et ça a payé, de quoi égaliser les débats.

Quelques longues secondes d’un répit nécessaire, chacun prenant le temps de souffler, de récupérer sa respiration. La partie droite de son corps a souffert de la déflagration, c’est sur ce flan que je vais devoir insister pour l’emporter. Mais il possède un atout de taille bien embêtant contre moi et il le sait, puisqu’il va en user sur le champ. Sa maîtrise du Ninjutsu affinitaire. Il enchaîne les signes incantatoires, je prends une posture défensive, concentrant mon chakra dans mes mains.
Deux gros corbeaux faits entièrement d’eau sortent de la bouche de l’ancien Genin, fonçant dangereusement sur ma position. Je les neutralise en expulsant une propulsion de chakra depuis les paumes de mes mains, balayant les volatiles aqueux qui s’éparpillent en gerbe d’eau au centre du terrain. Il enchaîne sur une nouvelle série de mudras, j’en profite pour enclencher de nouveau mon Byakugan, éteint depuis le coup de poing ravageur que j’ai encaissé tout à l’heure. Cette fois c’est un long fouet Suiton qui prend forme dans sa dextre, puis la sénestre. Avec, il tente de me saisir les poignets afin de neutraliser mon Juken, probablement. Une lutte à distance s’installe ainsi, dans laquelle je m’efforce de me mouvoir afin d’éviter d’être pris par les fouets, usant de ma grâce et de mon agilité au combat pour me soustraire de ces chaînes élémentaires. Mais je me fatigue, ce combat commence à durer et il n’est pas sans conséquence sur mon corps, déjà bien malmené par mon opposant. Et plus je me fatigue, plus je perds ma lucidité et laisse ma rage prendre le dessus, cette énergie qui semble si puissante et inépuisable en cet instant…

D’un déplacement rapide, je casse la distance, vient le chercher sur mon terrain. Qui est aussi le sien, au final. Ce salopard étant naturellement doué à la fois pour le Taijutsu et le Ninjutsu. Nos coups s’annulent, se heurtent chacun à la défense de l’autre. Mes paumes claquent sur ses poings, ses poings ricochent contre mes paumes. Une frappe passe de mon côté, au niveau de son épaule. Qu’il me renvoie immédiatement d’un coup de poing dans la tronche.
Je balaie le sol de mon pied, cherche à le surprendre, à le déstabiliser au mieux. Frappe ses côtes, mais ça ne passe pas. Agacé, je me montre plus insistant, enchaînant les coups, semblant prendre le dessus. Un passe sa défense, claque son menton, me conforte dans cette idée.
C’est ici que je perds l’échange.

Guidé par mes émotions, par des impulsions, je ne fais que me précipiter et m’exposer. Le contre est terrible, il bloque habilement mes deux mains avec un seul de ses membres, jouant sur la force pour me maintenir dans cette position suffisamment longtemps, seulement quelques secondes à peine, pour s’emparer d’un kunai de sa main libre pour mieux enfoncer l’arme dans mon avant-bras droit.
La douleur s’insinue en moi sous la forme d’une décharge électrique, j’en perds ma concentration et il s'engouffre dans la brèche. M’enchaîne de plusieurs frappes qui s'abattent sur moi comme un marteau sur une enclume, avant de m’envoyer valdinguer en lisière de forêt d’un coup de pied sauté.
Je cherche à me relever, le corps qui hurle sa douleur et l’esprit totalement désorienté, ne sachant pas s’il doit m’alerter et me pousser à fuir ou me motiver et me forcer à combattre. Sauf que ce n’est pas une question de choix, mais d’honneur. Je me battrai jusqu’au bout, jusqu’à y laisser ma vie s’il le faut. Cette vie contre laquelle Karasu a décidé de s’acharner, visiblement. Un dragon Suiton me balaie immédiatement après que je me sois remis sur mes pieds, surgissant dans la forêt comme le diable sort de sa boîte. Sa puissance m’entraîne plus en profondeur dans les bois, je m’écrase contre le tronc d’un arbre, peinant à rester conscient.

L’ombre du déserteur se rapproche, semblant se mouvoir en faisant fi de la gravité, avant que l’acier me transperce à nouveau. Directement dans le ventre, cette fois. Et cette douleur qui revient avec bien plus d’intensité au fur et à mesure que la lame du kunai progresse à travers ma chair. Mes yeux affolés cherchent un point d’encrage alors que je sens ma vie s’envoler, mais ne trouvent rien sur quoi se raccrocher, si ce n’est le regard de mon meurtrier. Qui exulte. Et cette vision me glace le sang, le sien bouillonnant sous l’excitation éprouvée à la vue qui s’offre à lui. — C’est terminé, mon cher cousin. Sois rassuré et pars sans crainte, personne ne pleurera ta perte. Pas même ta petite protégée. Je cherche la force de lui répondre, mais seul du sang sort de ma bouche, trahissant la triste vérité qu’il vient d’émettre. J’ai perdu. J’ai tout perdu.
Je ne suis même plus capable de l’empêcher de partir. Il retire simplement son kunai, me tourne le dos. Il s’éloigne tandis que mes paupières se referment, se faisant trop lourde pour que je puisse les maintenir en haut, pour que je puisse rester encore conscient quelques secondes de plus. Je m’effondre vers l’avant et avant même d’avoir heurté le sol, j’ai déjà perdu connaissance…