Hiver 82, jour du tournoi - Quartier Fujiwara, Homura.

Lorsque j’avais accepté de m’inscrire à ce tournoi, jamais je n’aurais imaginé qu’il prenne de telles proportions. Les spectateurs étaient venus en nombre, si bien que je doutais que les gradins soient assez grands pour tous les accueillir. Qu’avait donc en tête Kamui lorsqu’il avait organisé cette rencontre entre les genins d’Homura ? Il n’y avait qu’un Fujiwara pour composer une compétition de cette taille. Je ne comprenais même pas comment cela avait pu prendre de telles proportions. Je croyais que ce tournoi était là pour renforcer les liens entre nous ? Comment vouliez-vous que nous fassions connaissance avec autant de pecnos autour de nous ?

Car oui. Ne nous mentons pas. Je ne voyais pas l’intérêt d’un tel public. Ils étaient tous là pour jauger notre puissance, juger nos compétences. Je ne les connaissais pas. Je ne souhaitais pas qu’ils me connaissent. Tssss… On m’avait un peu trop survendu ce tournoi. J’avais cette désagréable impression de m’être fait baiser en beauté par Kamui. Que cherchait-il vraiment à faire avec toutes ces fioritures ? Était-ce si important pour lui toute cette mascarade ? Non. Vraiment. Il y a quelque chose que je ne saisissais pas dans la tournure que prenaient les évènements.

Et le vieil homme qui s’égosillait avec passion au centre du terrain. Il allait nous faire une syncope s’il ne se calmait pas un tantinet. Quelle mouche l’avait donc piqué ? Je n’étais pas convaincu qu'exciter le public comme il le faisait était l’idée du siècle. Quant au katana à sa ceinture, il ne trompait personne. Il ne fallait pas être devin pour savoir qu’il appartenait à l’illustre clan des Fujiwara. Illustre… Vraiment ? Qu’avaient-ils de plus illustre que moi ? Ils avaient bien préparé leur coup, ces petits cons.

Aucune bannière à leur effigie, mais de nombreux signes et objets faisaient planer leur ombre au-dessus de ce tournoi. Il y avait ceux que tout le monde voyait, mais personne n'y prêtait vraiment attention : les kanjis du bushido, un samouraï comme présentateur, l'arène positionnée au cœur du quartier Fujiwara. Puis il y avait ceux que l’on voyait moins. Des personnalités haut placées étaient présentes. Étant sur leurs terres, il allait de soi que les Fujiwara allaient assurer eux-même la sécurité durant la rencontre. Je n’avais pas de preuve formelle, mais le contraire aurait été étonnant, voire même dégradant pour l’image du clan. De telles personnalités ne laisseraient jamais quiconque cracher sur leur honneur.

Ils avaient donc soigneusement planté le décor, tout prévu dans les moindres détails. Lorsque le vieillard nous annonça, la foule se mit à hurler. A mon goût, elle en faisait légèrement trop. Voir même plus que légèrement. C’était bien la première fois que je participais à un tel évènement. J’avais troqué l’accoutrement habituel des shinobis contre la tenue traditionnelle du Gang des Sept Nains. Je n’avais pas vraiment eu le choix de mon accoutrement : le vieux avait absolument souhaité que je la porte. Il avait une meilleure vue d’ensemble que moi de la situation.

C’est donc paré des couleurs chaudes de l’automne que je m’avançais avec les autres candidats au centre de l’arène. Je me sentais si petit au milieu des autres concurrents. A moins que… Ce n’était pas ma taille le problème, mais la leur. Alors que je m’installais à gauche du présentateur, ce dernier fit savoir que :

« … je vous invite désormais à vous présenter à tour de rôle à votre public. »

Quoi ? Comment ça, il fallait se présenter ? Mais… Ce n’était pas du tout prévu au programme, ça. Pourquoi fallait-il que je me présente à de parfaits inconnus ? Pitié. Au secours. Sortez-moi de ce cauchemar. Ce vieillard racontait vraiment n’importe  quoi ! En plus de nous présenter, il fallait les saluer « dignement pour les remercier de leur présence ». Personne n’allait lui dire de se taire ? Vraiment ? Non ? Ça ne choquait que moi ? Mais personne ne leur avait demandé de venir. Ah. Si. Kamui. Je le foudroyais du regard. J’irais lui toucher deux mots… non, un bon coup derrière la tête pour lui faire retrouver ses esprits ! Ca sera beaucoup plus parlant que deux mots !

Lorsque se fut mon tour, je restais tétanisé sur place. Je n’avais pas du tout envie d’être mis sur le devant de la scène. J’aurais tant voulu être une petite souris pour me glisser dans un trou et disparaître de leur vue… A moins que cela soit à eux de se fondre dans les ombres. Je fermais les yeux et pris une grande inspiration pour faire descendre la pression. Instinctivement, mes mains enchaînèrent une série de mûdras et Bwabwa fit son apparition à mes côtés. Marionnette haute de trente-cinq centimètres, elle vint se mettre debout sur mes épaules. Elle se mit à lancer de joyeux « bwa » et à secouer énergiquement le bras pour saluer la foule.

Je finis par m’avancer, sourire crispé sur les lèvres. Admettons-le : c’était plus une grimace qu’autre chose. Quelle bande d’hypocrites. Ils avaient le public dans leur poche. Foutus Fujiwara. Les applaudissements étaient beaucoup moins prononcés pour quelqu'un qui n’avait point le prestige d’être bien né. J’avais envie de prendre mes jambes à mon cou. Comment voulait-il que cela nous mette dans de bonnes conditions ? A croire que l’on partait déjà perdant. Si nous n’étions pas un Fujiwara, on était quoi ? Des petites merdes insignifiantes ? Raaaaah, ça avait le don de m’agacer.

« Euh… Salutations… »

C’est sûr, ça n’avait la gueule d’un Fujiwara. Ni sa prestance, d’ailleurs. Je ne savais même pas à qui adresser mes politesses. Je n’avais jamais fait ce genre d’exercices oraux et cette expérience étant assez traumatisante pour mon petit cerveau, je ne comptais pas retenter l’expérience de si tôt.

« Bwahahahah ! »

Lui, il s’amusait comme un petit fou. Il continuait de saluer le public, comme si de rien n’était. Généralement, Bwabwa était apprécié. Il était con, mais il faisait rire. Je l’avais appelé si souvent depuis que je l’avais créé, que je le faisais bouger naturellement, sans même y penser. Parfois, je me demandais si cette marionnette n’avait pas son âme propre.

« … Euh… Moi, c’est Kaïto ! »

« Bwa bwa bwa bwa bwaaaaahahahahah ! »

Ah ! Il allait être relou, lui, à ponctuer toutes mes phrases. Je finis par lever ma main droite. Je la secouais rapidement pour « saluer » le public. Je regagnais rapidement ma place. Chaque présentation qui me suivit fut relevée par un magnifique discours de la marionnette. Pour bien emmerder le monde, je me gardais bien de la rappeler. Nouvelle salve d'applaudissements. Le vieillard reprit ses explications. Celles-ci furent interminables. Le plus intéressant fut lorsqu’il annonça les duels. Génial… Je passais en premier. Et même pas contre un Fujiwara. J’espérais avoir plus de chance dans trois jours.

Alors que je m’avançais pour me préparer au duel, une main vint se poser sur mon épaule. Impossible pour moi d’esquiver Kamui. Ce sont deux pupilles rougeâtres qui vinrent se poser sur le Fujiwara. J’étais encore en colère contre lui. J’étais persuadé qu’il m’avait joué un mauvais tour, alors que je n’avais simplement pas compris les tenants et les aboutissants de ce tournoi.

« Bonne chance ! »

Pardon ? C’était quoi, ça ? Il était vraiment sincère ? Pourquoi se serait-il abaisser à faire une telle chose ? On se connaissait à peine. Et ce sourire encourageant ? Etait-il vraiment réel ? Est-ce qu’il l’avait fait uniquement pour moi ? Pfff ! Il essayait de tromper ma vigilance, de me détourner du combat qui m’attendait. Ou alors, il cherchait à se faire pardonner !

« Bwabwa bwa bwaaaaah ! »

Et la marionnette lui écrasa la main sans ménagement avec son pied. Je ne pus retenir un petit rire moqueur et me dégageait de sa poigne sans avoir pris la peine de lui répondre. A ce moment-là, ce fut fort dommage que Kamui ne puisse voir que mon dos car un magnifique sourire, sincère et heureux, venait de fendre mon visage : il avait pensé à moi. Et juste à moi. J’étais quelqu’un pour une personne. Je n’étais pas ce petit garçon invisible que les adultes avaient laissé crever en silence. Non. J’étais quelqu’un aux yeux de Kamui. Un être vivant.

Technique utilisée:

La jeune artiste ne pût retenir un sifflement d’admiration au moment de pénétrer dans l’arène, on pouvait dire que le clan Fujiwara avait mis les moyens pour l’organisation de ce tournoi.

L’arène, déjà impressionnante vu de l’extérieur, écrasait de toute sa hauteur les participants alignés devant une foule incroyablement excitée à l’idée de voir les échanges des dix genins ainsi présent au centre du terrain. Bien aidé, il faut le dire par le discours d’introduction du vieux samouraï.

Les uns après les autres, les candidats s’avançaient et se présentaient à la foule. Nombre d’entre eux étaient des adorateurs du Bushido mais d’autres personnalités émergeaient du groupe. Le nain Kaito avec qui elle avait disséquée un Yokai quelques temps auparavant, un aveugle mystérieux ou encore Tsukiyo la louve. Ils étaient donc quatre étrangers au clan Fujiwara, encadrés par six samouraïs.
La plupart des présentations étaient des plus sobres. Hormis le dénommé Kamui qui réalisa un discours digne d’un prince. Peut être était-il l’héritier du clan ?
En tout cas Hanabi était ravie de cette occasion de pouvoir réaliser quelques cartes des différents opposants. C’était une idée de business qu’elle avait eu en regardant jouer des enfants avec des cartes de jeux, elle souhaitait réaliser elle même un jeux de carte a l’effigie des ninjas d’Homura, persuadée de son succès.

Ce sera donc avec attention qu’elle assistera à chaque combat, peignant les compétiteurs, notant leurs capacités, enregistrant leurs chakra. Elle ne laisserait rien passer.

Mais en attendant elle devait s’acquitter d’une autre mission. En s’inscrivant à cette compétition Hanabi avait trois objectifs: réaliser quelques ventes en amont du tournoi, recueillir des informations sur les autres participants et se faire un peu de pub. C’était le moment de s’occuper du troisième objectif.

S’avançant à son tour pour se présenter la jeune fille prît une profonde inspiration elle déclara d’une voix tonitruante afin que tout le monde puissent l’entendre.

« JE M’APPELLE MATSURIKA HANABI, PEINTRE DE GÉNIE, VOUS TROUVEREZ MON ÉCHOPPE AU XX, RUE XXX DANS LE CENTRE VILLE !! N’HÉSITEZ PAS À VENIR ADMIRER MES ŒUVRES !»

Se retournant alors vers les gradins des officiels, et plus particulièrement vers le siège le plus prestigieux, la jeune artiste ajouta:

« Shogun Iwao ! J’espère que vous serez ravie des échanges que vous verrez aujourd’hui ! J’espère que vous me laisserez l’opportunité de peindre votre portrait ! »

Sa mission remplie elle retourna à sa place, souriante aux autres genins qui avaient un air incrédule sur leur visages.
Quelle belle mâtinée pleines d’opportunités !

C’était maintenant le moment pour l’artiste du Pays des Tourbillons de songer à ses futurs combats. Ça n’allait pas être de la tarte mais ses objectifs étant remplis c’est le coeur léger qu’elle envisageait les affrontements à venir.