♩montre-toi, âme infâme fin de l'hiver 82, pays du feu – ft. fujiwara kamui

Il avait fallu bien des jours à cet être pour traverser les récifs boisés d'un pays autrefois familier, à l'occasion de quelques heures bercées de lune et d'incertitude. Lui qui avait laissé derrière lui l'ombre de la clé de ses désirs, il imposait désormais sa silhouette aux abords de cette cité qui n'avait de nom que celui du pouvoir qui ne savait se contrôler lui-même, de couleur que celle de l'envie – mais qu'il s'abrite en ces lieux le plus grand des infâmes ou la plus douce des ingénues, il cherchait en eux bien d'autres choses... quand bien même se tenir simplement devant l'agencement de leur force révoltait son estomac d'aigreur.

Ses iris d'or dardaient l'arche sacrée avec tout le dégoût qu'elle pouvait lui inspirer – cœur névralgique de l'ancien Empire qui avait asservi les siens, il ne méritait pour lui nul honneur, ni égard... et pourtant, il semblerait que le destin avait une nouvelle fois joué l'un de ses tours les plus infectes ; car il semblerait que son âme ne saurait tarder à s'associer à les leurs, ne serait-ce que pour une seconde d'éternité.
L'écho de pas lui parvint, tout d'abord distraitement ; puis distinctement. Alors, ses yeux s'arrachèrent à cette pierre rougie pour s'attarder sur la silhouette qui se présentait à lui – et dieu que les Moires riaient de lui, à le présenter face au reflet de brins de blés qui épousèrent les profondeurs de son regard. L'ocre de ses prunelles se mêlait à ce blond et à ce pourpre que son esprit abhorrait à l'image de ces maîtres des sceaux cachés dans les tourbillons d'un autre monde, gouvernant l'un sans s'attendrir sur l'autre. Il ne put retenir sa hargne de s'élever, encore moins de traduire son reflet le plus pur en fendant ses pupilles de leurs natures bestiales, irradiées par une colère qui ne saurait jamais trouver le repos.

Sa poigne se resserra sur elle-même, plantant – cachant – ses ongles devenus griffes dans la chair qui l'époumonait tant elle l'emprisonnait ; et lorsqu'il l'avisa, considérant sa venue au sein de sa patrie et manqua de prononcer quelques paroles, ce fut le reptile qui prit les devants pour l'assurer, d'un murmure qui tentait de contrôler la hargne de son âme. Quand bien même il le voudrait, il ne pourrait déloger sa vue de son être, transfixé par une adrénaline qui intoxiquait ses veines de tous les soupirs que les fantômes glissaient à son oreille.

Son corps fut forcé à l'immobilisme, à l'attente et à un contrôle qui lui échappait malgré son mal ; tel une statue à la fois ancrée et suspendue dans le temps. Le souvenir qu’un barde ayant suivi le chemin de ces terres s’était absous à son esprit – il n’existait plus rien, si ce n’était un gouffre dans lequel son esprit spiralait indéfiniment.

« …Je souhaiterais m’enquérir d’une affaire dans la capitale. »

Son regard demeurait ancré sur la silhouette de cet inconnu, incapable de l’en ôter – une bête gisant, amère, telle un funambule au seuil des terres de l’humanité et des yokai.

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récapitulatif:

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Le voyageur considéra un instant son vis-à-vis, se défaisant de l'emprise des mots et des paroles vides de sens que lui adressaient tous ces gardes – il n'avait cure de ce qu'on lui imposait tant qu'un soupir pouvait leur répondre sans remous et éclat de voix.
Lorsqu'il s'approcha davantage, ses pupilles parurent s'agacer ; trembler, presque. Ses poings se refermaient avec bien plus de force, les fentes de son regard s'affirmaient pour traquer chacun de ses pas – et s'il ne se souvint pas qu'il se trouvait là dans une terre étrangère, entourée de bien plus d'hommes qu'ils ne seraient capable de battre tous à la fois, peut-être aurait-il laisser sa nature le guider vers ce que son âme lui hurlait à s'en époumoner.

Mais semble-t-il qu'elle ne se soit trompée, en voyant en lui le rejeton de l'un de ces bienpensants étouffés par leurs propres traitrises : son nom n'en portait nulle trace, si souvenir. Il trahissait par sa simple existence tous les filons de devoirs et de respect que l'on imposait aux manieurs du Fer, dont les terres d'origine se battaient aujourd'hui contre ceux qu'il exécrait le plus au monde. Alors, au rythme de respirations assourdies, la hargne gisant dans ses yeux parut se tamiser, sa mâchoire se détendre – et si ses prunelles demeurèrent égales à elles-mêmes, elles se refusèrent à se faire le miroir d'une colère d'autrefois.

« Une fois que l'on a essuyé les contrôles du Pays de la Foudre, plus rien ne vous semble extrême. », lâcha-t-il simplement sans adresser une œillade aux gardes, dont les ombres trouveraient son dos après quelques pas.

Il sembla accueillir la venue de l'homme avec une forme de retenue, non sans être marquée d'attention – s'il se proposait ainsi pour être son guide, non pas qu'il ressente le besoin d'un quelconque apparat comme celui-ci, une chose le frappa. Partout où semblait se loger son attention, des signes de luttes se glissaient dans les recoins des constructions, des éclats paraient certains murs, des coups d'épées se trouvaient ailleurs. La forêt lui avait parue étrange, elle aussi, lors de son périple : des arbres semblaient avoir été pliés par une gigantesque force, des armes avaient été abandonnées dans les bosquets. Ils lui rappelaient les échos de la guerre civile qui avait saisi les Nuages et dont il avait été témoin malgré lui – les pays du monde étaient-ils tous en proie à ce genre d'instabilités ?

Il réalisa, toutefois, que ces dégâts ne semblaient toucher que l'orée de l'arche où ils se trouvaient. Les bâtiments au loin ne souffraient pas de telles injures : les fumets de quelques mets lui parvenaient même, parfois, guidés par le vent depuis le cœur de la cité.
Shānyùe se retourna vers son interlocuteur – après tout, ne s’était-il pas proposé pour lui faire découvrir ces contrées ?

« Leur village était toutefois dans un même état que le vôtre... non sans raison. Que s'est-il passé ? »

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Les pas du reptile manquèrent un battement, à l'écho de sa voix. Ses pieds s'ancrèrent dans les graviers, dardant la chevelure iridescente de son vis-à-vis – des soldats otojins. Ses yeux s'étaient métamorphosés en une seconde, répondant à la colère qui s'élevait doucement dans ses entrailles pour mieux l'absoudre. Ainsi s'en prenaient-ils à toutes les contrées auxquelles leurs frontières se trouvaient adossées – et si le souvenir des Montagnes crevait son cœur à en gémir comme un martyr, les soupirs que cette possibilité lui susurraient pourraient lui offrir le moyen de leur faire payer le prix de leur propre fer, sous le couvert d'un tout autre pays.

Sa marche reprit, calmement – comme s'il mesurait le poids de sa rancœur, pour qu'elle ne se trahisse pas dans chacun de ses mouvements. Son regard s'écrasa dans celui du samouraï, avant de déclarer ;

« Le Shogunat envisage-t-il des représailles ? »

À en juger par ses paroles, leur entreprise n'avait trouvé que peu de réussite : pire, ils auraient été mis en déroute avec une certaine facilité – mais pouvait-il simplement le croire, lorsque l'on s'adressait à un soldat, dans un monde où les apparences avaient parfois bien plus de crédit que la réalité ? Si sa visite au creux des Nuages lui avait appris une chose, c'était bien celle-là – et le Seigneur de ces terres semblait en être le plus friand de tous.

« Si tel est le cas, prévenez-moi. »

Il n'eut pas le temps de développer davantage son discours qu'un bouffon vint heurter le manieur de lames, lui adressant un regard noir qui lui aurait bien valut de lui briser le cou. Dans le dos du Fujiwara, Shānyùe rendait la même animosité à l'inconnu, le nez froissé par l'amertume. Pour qui se prenait-il ?
Son attention s'échoua sur l'échine de son guide, qui se courbait d'une involontaire platitude pour la faute d'un autre qui aurait bien mérité d'étouffer par la rancœur de son geste. Pourquoi s'écrasait-il face à un ignare, un faiblard qui voyait dans ce dédain la seule manière de faire jouer les fruits d'une ascendance qu'il ne possédait point, en se gonflant d'une fierté qui disparaissait aussi vite que son courage.
Mais il ne fit rien ; ne dit rien. Il se contenta de l'observer s'éloigner, avec cette supériorité feinte peinte sur son visage, jusqu'à ce que son ombre ne soit plus qu'une silhouette anonyme ne valant pas même que l'on s'attarde sur son souvenir.

Il avisa le samouraï, un temps.

« Vous auriez dû lui écraser le crâne. Il aurait certainement mieux trouvé son chemin, avec son nez rampant au sol comme un chien. »

L'homme reprit la marche sans un mot de plus, calmement ; le bruit de ses pas traçant l'onde aveugle d'une destination dont il ignorait tout. Puis il se souvint de la question du soldat.

« Il ne s'agissait pas d'une invasion. », répondit-il sans oser une oeillade dans sa direction. Ses yeux fendus dardaient l'horizon, à la recherche d'une auberge – un endroit où échanger un peu d'or contre de quoi se nourrir. « L'élection du nouveau Raikage a soulevé les foules, et Inuzuka Getsumen – l'élu – en a profité pour mener un coup d'état pour assassiner leur Seigneur. En vain, cela dit. Entre cela et les factions dissidentes qui complotent sous leur sol, la soi-disant grandeur que le Daimyo des Nuages s'évertue à ancrer comme une réalité fait peine à voir. »

Il avisa enfin le Fujiwara flavescent, du coin de l'œil.

« Entre la Brume sanglante et la guerre civile de la Foudre, le shogunat est peut-être le plus normal de tous – enfin, pour l'instant. »

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Dernière édition par Seijuu Shānyùe le Sam 28 Oct - 18:46, édité 1 fois

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Ses iris trouvèrent l'enseigne dépeinte par le samouraï, la considérant un instant tandis que ce dernier ajoutait quelques mots pour le convaincre d'y poser le pied ; et sans plus de cérémonie, le métamorphe passa le pas de la porte, glissant une œillade au tenancier en lui confiant ce qu'il désirait. Un plat de ce qu'ils faisaient de plus fin, affublé d'une bouteille de saké. Il ne put s'empêcher de trouver la chaleur qui émanait de la bâtisse bien plus attrayante que les effluves qui s'en échappaient : suffisamment pleine pour assourdir leurs paroles dans un brouhaha que nul n'aurait intérêt à épié, et tout autant déserte pour ne pas l'étouffer de la présence d'autrui. Il ne trouva rien à redire et trouva bien vite un endroit où se poser – une simple table pour deux, assez large pour se délecter de quelques bouchées. Sa cape trouva le dos de sa chaise pour seul repos, dénouée de ses épaules comme un simple bout de tissu. Sa voix, elle, trouva le chemin des interrogations de son vis-à-vis, les sourcils légèrement arqués par l'étonnement – était-ce simplement possible d'ignorer l'état de l'Eau ?

« J'admets être quelque peu surpris par votre manque de connaissance sur la Brume. », dit-il simplement, laissant le tenancier déposer une écuelle remplie de divers morceaux de viande et de légumes couverts d'épices, le tout plongés dans un bouillon de nouilles. Son regard s'ancra sur l'alcool que l'on plaçait à son flanc, ainsi que deux verres en osier. Il prit sur lui de servir son vis-à-vis en premier – de sorte que le tenancier ne s'éloigne de leur table pour de poursuivre – avant d'en faire de même pour lui. « La Brume sanglante, comme ils l'appellent, est une sorte de mécanisme de défense qui protège les intérêts de leur village. De façon très simple, la brume qui entoure Kiri est mortelle : elle tue et fait fondre tout individu ayant pour objet de la trahir ou d'aller à l'encontre ces-dits intérêts. C'est certainement pour cela que vous n'envoyez plus d'émissaires, pour l'heure. Un moyen efficace de savoir si tout dignitaire est animé de bonnes ou de mauvaises intentions, au point où il détient aujourd'hui tellement de crédit que l'on peut faire usage de ces « meurtres » pour demander des comptes aux pays qui les ont envoyés. Bien étrangement, elle ne se trompe jamais – et cela a le don de faire rentrer dans le rang même les plus réfractaires. »

Lorsque le samouraï évoqua la situation de la Foudre, son regard s'assombrit l'espace d'une seconde, lorsqu'il se remémora les affres que leur Seigneur avait imprégné dans sa chair. Sa dextre s'empara des baguettes que l'on avait déposé sur son bol, soufflant sur les nouilles de riz avant de les porter à ses lèvres, non sans quelques morceaux de viande. La surprise se lit de nouveau sur ses traits – celle bienvenue, qui trahissait à quel point son repas lui convenait. Il prit un temps pour l'apprécier, avant de répondre à son interlocuteur.

« La situation s'est résolue – ou plutôt, temporairement, puisque d'un côté se trouvait leur seigneur, et de l'autre, leur Raikage nouvellement nommé. », il tut toutefois le nom de ce dernier, en plongeant son regard dans celui qu'il avait mépris pour un enfant des Tourbillons.

Il écouta, alors, attentivement ce qu'il lui conta à demi-mot sur l'attaque qu'avait essuyé sa terre ; sur un ton qui ne passa pas inaperçu. Différé, l'air de rien. Une balle lancée dans les airs pour voir qui oserait l'attraper et lui apporter plus de corps qu'une simple pensée. Shānyùe aurait pu se laisser aller à agir comme cela, lui faire part de nombreuses choses encore.
Mais très honnêtement, il n'avait aucune raison de le faire.

« En effet, “Naga” est un nom qui m'est familier. Toutefois, je ne vois pas ce que vous raconter tout ce que je sais pourrais m'apporter. », lâcha-t-il sans animosité, en se délectant d'une gorgée d'alcool. « Vous êtes intéressés par ce que je sais, mais je n'ai pour le moment rien à y gagner. »

Il soutint son regard, un temps – il n'était, après tout, qu'un simple voyageur traversant le Pays du Feu, et de passage à Homura. Il y avait bien une chose, toutefois, qui l'intéressait : peut-être trouverait-il, au sein d'un livret sans valeur, des savoirs qui en auraient pour le métamorphe – peut-être auraient-ils même recueilli quelques visages et noms sur lesquels il pourrait placer sa rancœur ; des hommes du Son dont il pourrait se servir pour assouvir ce qu'il ne cessait de rechercher.

« Peut-être pourriez-vous commencer par me montrer votre Bingo book ? »

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Un sourire amusé trouva les lèvres du reptile lorsque les rétorques du samouraï lui parvinrent, glissant près d'elles l'ombre de l'alcool qui roulerait bientôt sur sa langue ; hasard, destin ou opportunité, il avait compris il y a bien longtemps que ces mots s'interchangeant dans la bouche des hommes au rythme des occasions qui se présentaient à eux. Mais peut-être n'avait-il pas tort – peut-être sa venue en ces lieux lui apporterait-elle bien plus que ce qu'il ne pensait, dans un temps lointain où ses gestes du jour se répercuteraient sur l'avenir. Ses prunelles se posèrent sur les reliures de cuir de l'objet, frappé d'un symbole qu'il avait vu de nombreuses fois arboré sur des bannières ou des vestons. Le livret s'ouvrit sous les yeux du flavescent, qui tournait doucement les pages jusqu'à tomber sur celle qui traduirait son intérêt – le visage de ce fameux Naga, accompagné d'un homme dont il n'avait encore jamais entendu le nom, si ce n'était susurré avec hargne et colère par des gardes.

« Ainsi donc est-ce à cela qu'il ressemble. », déclara-t-il simplement. Le verre retrouva sa place devant son écuelle, dans un tintement éphémère. Lorsqu'il lui tendit le livret, Shānyùe ne put que tendre la main à son tour pour s'en empoigner. « Je vous en remercie. »

Les yeux de l'homme s'attardèrent sur les lignes que renfermaient cet ouvrage, avec une attention méthodique qui paraissait s'enivrer des informations que les grands de ce pays avaient incrusté – concises, précises, véridiques. Les traits de Naga s'ancrèrent dans son esprit tandis qu'il tournait la page, dévoilant le fasciés de l'incendiaire – les suivants n'étaient que ceux d'individus dont il ignorait comme il se fichait de l'existence. Lassé de leur spectacle, il manqua de clore ce chapitre pour le retourner à son vis-à-vis ; mais un détail l'arrêta dans sa course, revêtu de dorures qui épouseraient à s'en méprendre la bague nouée à son cou, sous ses vêtements. Il reconnut son visage pour l'avoir contemplé au cœur du Pays du Feu – pour avoir vu une myriade d'émotions siéger sur ses traits. Atori. Ainsi découvrait-il son nom.
Son attention longea les lignes que l'on avait rédigé à son sujet, avide de la curiosité que l'on avait fait naître dans le creux de son être. Il aurait dû la retenir, l'interdire ; car dans le délice d'en apprendre plus à son sujet se révéla le fruit défendu de ses origines : un musicien du Pays du Son. Ses yeux se fendirent instantanément sous la colère, des écailles ravirent sa peau jusqu'à conquérir, de leurs ombres amères, le couvert de ses vêtements – il dû se retenir d'en arracher la page, de se relever de ce siège infâme pour retrouver sa trace ; lui faire payer l'offense de l'avoir trompé.


Un long silence s'écoula avant qu'il ne daigne reprenne la parole. Son corps n'avait pas bougé, ses doigts non plus – la page était demeurée la même, et ses yeux, eux, s'élevèrent vers le samouraï dans un mélange de colère que l'on tempérait dans ses veines et d'aigreur mesurée. Il força sa voix au calme, sa dextre crispée sur la cotte du livre que l'on lui avait légué. Que ses sens fussent exacerbés ou non, le samouraï pourrait constater son état – comme il n'était nullement dirigé vers lui, sans pour moins exister.

« Si je dois vous confier les informations que je possède sans l'assurance de celles que vous me rendrez, et ce en connaissance de leur valeur, voici ce que je vous demande : que je puisse en collecter la dette lorsque je le désire. Le fonctionnement de votre pays ne m'importe peu, et la rigueur des samouraïs ne m'est pas assez étrangère pour que je soupçonne que cela ne vous mette dans l'embarras – je ne suis, après tout, qu'un étranger. », il ajouta, son regard soutenant le sien. « J'ignore la forme qu'elle prendra, si ce sera de nouvelles informations que je viendrais quérir, si vos yeux devront se fermer sur l'un de mes agissements ou si je nécessiterais votre aide. J'en jugerais le moment venu, certainement. Votre clan est connu pour le respect de son honneur et de ses engagements – je sais que vous vous y tiendrez. »

Son regard était revenu trouver celui du samouraï, ses prunelles fendues par l'ire qu'il avait ressenti en contemplant ce visage – en réalisant son ascendance. Il pouvait sentir la colère se dresser un chemin dans ses veines, qu'il s'efforçait pour la première fois d'endiguer. L'homme qui lui faisait face n'en était pas la cause.
Son attention s'évapora sur les détours de sa bouteille d'alcool, outrageusement plus pleine qu'elle n'était vide. Sa dextre empoigna ses contours de verre avant de la déverser – petit à petit – dans sa coupe. L'eau de vie disparu entre ses lèvres ; la coupe fut de nouveau remplie, et dans un soupir, il chassa ses pensées pleines d'aigreur.

« Depuis de nombreuses années, le Pays de la Foudre peine à trouver la trace de l'un de ses fugitifs les plus emblématiques – Kazena Hideo. J'imagine que c'est, pour vous, l'équivalent de ce “Yamamoto Janome“. Ce simple fait est insupportable au Daimyo, puisque cela reflète précisément l'échec de son pouvoir. Je vous conseille d'éviter de le mentionner devant lui. », glissa-t-il, amer. « Et semble-t-il que la raison pour laquelle ils ne parviennent pas à le dénicher est qu'il a trouvé refuge sous les ordres de Naga. »

Si ses mots trahissaient le doute ou la possibilité, son ton, lui, assurait à son vis-à-vis leur véracité.

« Les hommes que j'ai entendu les appelaient tous deux “maîtres“. À l'évidence, Hideo a rejoint la cause de votre déserteur et ont tous deux échafaudé ce plan lorsqu'il était encore dans vos rangs : une entreprise comme celle-ci met du temps à se préparer. », une nouvelle gorgée d'alcool roula dans sa gorge – comme s'il le forçait à éteindre la colère qui grandissait dans sa poitrine, son esprit ne cessant de ressasser les mots encrés au flanc du nom du musicien.

Son corps s'enfonça davantage dans son siège, le regard vague dans l'air – il répétait ces mots comme il les avait confiés au seigneur, la mâchoire serrée par le souvenir de ce qu'ils lui avaient coûté.

« Ils opèrent sous le village caché des Nuages, par l'intermédiaire d'hommes à leurs ordres et sous ceux du Daimyo. J'ai croisé malgré moi le chemin d'un jeune genin qui s'est enfoncé, en l'ignorant, dans l'une de leurs cachettes lorsque la guerre civile faisait rage. », il reposa le Bingo Book sur la table, refermé par son cuir. « Une jeune recrue, je suppose, étant donné l'imbécilité avec laquelle il a déferlé dans leur cachette en hurlant comme un zouave, trahissant sa présence sans aucune aide extérieure pour mieux leur laisser le temps de dissimuler toutes les informations cruciales qu'il pourrait découvrir. »

Sa voix trahissait, lasse, l'exaspération qu'il avait vécu en l'observant ainsi manquer de prudence.

« Je l'ai suivi, et il n'a suffi que de quelques secondes pour que de nombreux ninjas l'encerclent et ne placent une lame tout contre sa gorge en un battement de cil ; bien plus expérimentés qu'il l'était. », Shānyùe soupira, avant d'ajouter : « Ils l'ont alors mit devant un choix : déclarer son nom et jurer sur son honneur qu'il rejoindrait leur cause en servant leur maître, ou mourir. La seule réponse qu'il trouva fut un rire, et demander si la paye était bonne en se débattant quelque peu pour cet honneur qui avait déjà disparu à la seule mention de l'or ; ceux-là agissaient aux ordres d'Hideo et de Naga.
Quant à la recrue qui les a rejoints, je suppose que son cadavre est déjà froid, à l'heure où nous parlons. Le Daimyo de la Foudre n'est pas connu pour sa clémence ou son appétit pour la trahison. »

Ses bras se croisèrent sur son torse, chassant les réminiscences de son entretien avec cet homme ; et en ressortissant l'inévitable conclusion.

« Entre outre, puisqu’ils souhaitent révolutionner ce monde à l'aide des bijuus, si vous cherchez la piste des Démons, vous tomberez certainement sur des indices qui vous permettront de remonter jusqu'à lui. », son regard trouva de nouveau celui du samouraï, inflexible. « Voilà tout ce que je sais. »

Sa dextre ouvrit de nouveau le Bingo Book qu'il lui avait confié, glissant ses doigts jusqu'à la page qui l'intéressait ; et retournant l'objet vers son propriétaire en le faisant glisser sur le bois de la table, il soupira sa première requête – qui n'avait certainement pas autant de valeur que ce qu'il venait de révéler.

« Dois-je en conclure qu'il est devenu l'hôte du Démon Renard ? »

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